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L’Afrique doit développer sa politique alimentaire

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L’Afrique doit développer sa politique alimentaire

Les bonnes intentions ne suffisent pas
Masimba Tafirenyika
Panos/Mikkel Ostergaard
Distribution de maïs dans un petit village du Malawi. Photo: Panos/Mikkel Ostergaard

Les pénuries alimentaires chroniques que connaît l’Afrique demeurent obstinément sans solution. Consciente de ce problème, l’Union africaine cherche à convaincre ses membres d’augmenter leurs investissements dans le secteur agricole. Pour souligner le rôle central que joue l’agriculture dans la croissance économique du continent cet organisme continental a déclaré 2014 Année de l’agriculture et de la sécurité alimentaire.

Convaincre les dirigeants de considérer l’agriculture non seulement comme une solution pour mettre fin à la pauvreté, mais aussi comme un important facteur de développement économique qui mérite des investissements publics est un défi de taille. Une telle ambition exige un engagement politique fort et une direction éclairée. On peut constater des signes de progrès, en partie grâce au Programme détaillé de développement de l’agriculture africaine (PDDAA), un programme novateur conçu par l’organisme de développement de l’Union africaine, le Nouveau Partenariat pour le développement de l’Afrique (NEPAD), qui célèbre cette année son 10e anniversaire

Un message fort

Le message du PDDAA est simple mais efficace : plus d’ investissements dans l’agriculture doit permettre de vaincre la famine en Afrique tout en sortant des millions de personnes de la pauvreté. Le programme a plusieurs volets, mais le plus connu d’entre eux exige de ses signataires qu’ils consacrent au moins 10% de leur budget à l’agriculture et qu’ils s’efforcent de réaliser une croissance annuelle de 6% dans le secteur agricole. À la fin de décembre 2013, on comptait 34 pays signataires dont six à peine avaient atteint l’objectif de 10%.

Les résultats du PDDAA sont pour l’instant mitigés. Certains pays ont encore du mal à traduire le programme en mesures concrètes. Mais ceux qui l’appliquent à la lettre notent des changements positifs. Comme le Rwanda, premier pays à avoir adopté le programme en 2007, qui a pratiquement multiplié par cinq la superficie des terres consacrées à la production de maïs en trois ans. En conséquence, les récoltes de maïs ont augmenté de près de 213% – passant de moins de 0,8 tonne par hectare à 2,5 tonnes - sur la même période. Le Malawi a également enregistré des avancées comparables - avant que le gouvernement ne réduise son soutien à l’agriculture, à la suite d’une crise budgétaire en 2012 – ce qui a également été le cas pour la Sierra Leone et la Tanzanie, notamment. Depuis 2003, la croissance agricole annuelle de l’Afrique se situe autour de 4%, soit bien au-dessus des taux de croissance des décennies précédentes.

Malgré cela l’Afrique reste un importateur net de denrées alimentaires et produit bien en deçà de ses capacités. La responsabilité en incombe principalement à de mauvaises politiques et, dans une moindre mesure, aux aléas climatiques.

Le PDDAA a besoin de fonds

Prenons l’exemple de la PAC, la Politique agricole commune de l’Union européenne (UE). Ce programme de subventions agricoles a été créé pour répondre aux pénuries alimentaires dont souffrait l’Europe dans les années 1950. La PAC dispose à la fois de moyens financiers - en 2013, elle a englouti 40% environ du budget de l’UE - et de moyens de pression suffisants pour imposer ses conditions aux membres qui bénéficient des subventions. Les subventions de l’UE ont certes des effets néfastes sur les agriculteurs des pays pauvres, mais elles ont permis d’améliorer les revenus des agriculteurs de l’UE et de produire davantage d’aliments de qualité pour les consommateurs.

Le PDDAA, à l’inverse, ne peut exercer qu’une influence morale pour convaincre ses membres de respecter leurs engagements. Pire encore: il dépend fortement des bailleurs de fonds pour investir dans les pays signataires. Il est aussi troublant de constater qu’une proportion importante des budgets nationaux de la plupart des pays signataires du PDDAA provient des bailleurs de fonds. L’Afrique est ainsi à la merci de la réduction des aides en cas de récession économique ou quand les priorités changent, ou lorsque la situation politique intérieure des pays africains concernés évolue comme l’ont clairement montré les événements au Malawi, au Rwanda et ailleurs.

L’efficacité du PDDAA dépend avant tout de la volonté des signataires de déployer les efforts nécessaires. Pour prouver l’importance qu’elle accorde à la sécurité alimentaire, l’UA doit dépasser le stade des bonnes paroles et suivre l’exemple de l’UE en obligeant ses membres à contribuer à un fonds agricole commun. La contribution de chaque membre pourrait être déterminée en fonction de ses moyens – sur la base du PIB par habitant, par exemple. Ce fonds pourrait ensuite servir à réduire la dépendance du PDDAA vis-à-vis des bailleurs de fonds. L’UA a créé une fondation afin de collecter des fonds pour les projets auprès de particuliers et du secteur privé.

Il est vrai que pour les pays pauvres, consacrer 10% de leur budget à l’agriculture est un objectif ambitieux, compte tenu des nombreuses autres priorités qui existent. Mais la réussite du secteur agricole permet de réduire les besoins de financement des programmes sociaux de lutte contre la faim et la pauvreté. Investir dans l’agriculture est donc un très bon calcul.Ìý

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