Sommet du G-7 : pleins feux sur l'Afrique
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Sommet du G-7 : pleins feux sur l'Afrique
Pour la première fois de son histoire, le Groupe des Sept pays industrialisés (G-7) a consacré de longs débats aux vastes problèmes de développement de l'Afrique lors de sa réunion au sommet annuelle. Le Sommet des Huit (G-7, plus la Russie), tenu du 20 au 22 juin à Denver (Etats-Unis), a déclaré que ce qu'il faut particulièrement aux économies africaines pour se développer, c'est un investissement privé plus abondant et un accès élargi aux marchés mondiaux. "Notre objectif est non seulement de faciliter l'intégration progressive des pays africains à l'économie mondiale", selon le communiqué final, "mais aussi de favoriser l'intégration des populations pauvres à la vie économique, sociale et politique de leurs pays".
Notant que l'aide extérieure ne peut à elle seule aider les pays africains à se développer, le communiqué a souligné : "En dernière analyse, la prospérité n'augmentera qu'avec la création d'un environnement favorable à la formation intérieure de capital, à une croissance dont le secteur privé serait le moteur et à une intégration réussie aux marchés mondiaux". Il a également fait l'éloge du nombre croissant de pays africains qui adoptent des politiques conformes aux lois du marché tout en entreprenant des réformes démocratiques, et réduisent les dépenses militaires en même temps qu'ils renforcent les institutions publiques et la société civile.
Le Sommet a d'autre part reconnu implicitement que les tarifs douaniers élevés et les autres obstacles dressés par les pays industrialisés entravent les efforts des pays africains pour augmenter leurs recettes d'exportation. "L'accès à nos marchés est un moyen crucial de favoriser la croissance en Afrique subsaharienne", ont déclaré les participants au sommet. "Nous continuerons, par différents moyens, à élargir l'accès des exportations africaines à nos marchés".
Dans ses aspects essentiels, le "partenariat pour le développement" avec l'Afrique lancé par le Sommet a fait écho à une initiative des Etats-Unis conçue pour augmenter l'investissement privé et les liens commerciaux entre l'Afrique et les Etats-Unis. Contrairement à l'initiative des Etats-Unis, qui met principalement l'accent sur le commerce et l'investissement et ne traite qu'accessoirement de l'aide, le communiqué du Sommet a déclaré : "Des volumes substantiels d'aide publique au développement continueront de jouer un rôle capital dans la mise en place des capacités qui permettront aux pays d'Afrique subsaharienne d'atteindre leurs objectifs de développement durable".
Durant les débats du Sommet, plusieurs chefs d'Etat européens ont également mentionné l'importance de l'aide extérieure. M. Tony Blair, Premier Ministre du Royaume-Uni, a annoncé qu'au cours des trois prochaines années son gouvernement augmenterait de 50 % le soutien apporté en Afrique subsaharienne à l'enseignement primaire, aux soins de santé de base et à l'approvisionnement en eau potable.
Les tarifs douaniers élevés et les autre obstacles dressés par les pays industrialisés entravent les efforts des pays africains pour augmenter leurs recettes d'exportation.
Plusieurs participants ont également fait mention des programmes d'aide, d'investissement et d'échanges commerciaux qu'ils conduisent de longue date en Afrique. Le président de la France, Jacques Chirac, s'est déclaré heureux que le gouvernement des Etats-Unis pense enfin au continent, tandis que le Chancelier allemand, Helmut Kohl, a salué "la découverte de l'Afrique par l'Amérique".
Lors d'une conférence de presse, répondant à la question d'un reporter au sujet de "l'accent unilatéral sur le commerce et l'investissement" propre à l'initiative des Etats-Unis, le Secrétaire d'Etat au trésor, Robert Rubin, a expliqué que "le but n'était en aucune manière de réduire l'aide", mais de la canaliser davantage vers les pays qui entreprennent des réformes inspirées par les lois du marché. M. Daniel Tarullo, Conseiller économique du Président Clinton, a ajouté que "la formule à retenir était : commerce, plus aide, plus réforme".
Dialogue approfondi
Préoccupées par le fait que l'ordre du jour du Sommet pourrait être considéré par certains comme une nouvelle façon d'imposer la volonté du monde industrialisé à l'Afrique, les participants ont promis d'"approfondir le dialogue avec les partenaires africains, de s'employer à associer davantage le continent africain aux stratégies de développement et d'encourager la participation des entités non gouvernementales".
Au cours du Sommet, les dirigeants du Congressional Black Caucus américain, certains groupes religieux et autres organisations non gouvernementales défendant la cause de l'Afrique ont toutefois publié une déclaration reprochant aux participants au Sommet de n'avoir invité aucun dirigeant africain à Denver. "Les décideurs doivent consulter les représentants des organisations de la société civile et des mouvements locaux avant de convenir de la manière de promouvoir le développement économique avec le plus d'efficacité", a déclaré M. David Beckman, Président de Bread for the World, l'un des signataires de la déclaration.
Le Sommet a non seulement appuyé la poursuite de la mise en oeuvre de l'initiative en faveur des pays pauvres très endettés, mais aussi pris nettement position sur l'allégement de la dette des pays en développement envers la Russie.
Le G-7 a recommandé l'admission de la Russie au Club de Paris, dont les membres sont des créanciers bilatéraux, mesure qui devra être approuvée par la totalité des membres du Club, peut-être d'ici à la fin de l'année. Pour légitimer son admission au Club de Paris, la Russie a accepté de limiter ses prétentions au recouvrement de la dette des pays en développement envers l'ex-Union soviétique.
En 1994, selon les sources russes officielles, les pays subsahariens devaient à la Russie 14,3 milliards de dollars et les pays d'Afrique du Nord, 10,7 milliards de dollars. D'après une analyse de la Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement (CNUCED), le montant que la Russie prétendait recouvrer de l'Afrique subsaharienne en 1994 était probablement de l'ordre de 16,8 milliards de dollars.
Selon les évaluations initiales, la réduction des demandes de recouvrement de la Russie, combinée avec les dispositions actuelles du Club de Paris en matière d'allégement de la dette, pourrait déboucher sur une réduction de l'ordre de 90 % de la dette due à la Russie par les pays africains pauvres très endettés. Ce serait là un fait nouveau d'importance particulière pour l'Angola, l'Ethiopie, la Guinée, le Mali, le Mozambique, la Somalie, la Tanzanie et la Zambie, pays dont la dette non amortie envers la Russie est considérable. Dans le cas de l'Ethiopie, cette dette représente 58 % du montant total de la dette extérieure, et dans ceux de l'Angola et du Mozambique, 44 % et 31 % respectivement.
Quelques jours avant de se rendre au Sommet de Denver, le Président des Etats-Unis, Bill Clinton, a dévoilé publiquement la nouvelle initiative de son gouvernement, "Partenariat pour la croissance économique de l'Afrique". S'engageant à soutenir "une nouvelle Afrique dynamique" qui se joint à "la marche mondiale vers la liberté et l'ouverture des marchés", il a annoncé le 18 juin une série de mesures en cours de discussion avec le Congrès qui offriraient de nouvelles incitations au commerce et à l'investissement.
Ces mesures comprendraient une augmentation du nombre de catégories d'exportations africaines ayant accès en franchise de droits au marché américain; elles passeraient d'environ 4 000 à 5 800, ce qui pourrait entraîner une augmentation de 50 % de la valeur des exportations africaines aux Etats-Unis. En 1996, les achats américains en Afrique subsaharienne ont atteint 15,2 milliards de dollars, soit une augmentation de 20 % par rapport à l'année précédente. En outre, le plan ferait usage des garanties offertes par le gouvernement, par l'entremise de l'Overseas Private Investment Corporation, pour encourager une nouvelle tranche de 150 millions de dollars d'investissements privés américains en Afrique, ainsi que 500 millions de dollars d'investissement dans les projets d'infrastructure du continent. L'initiative du Président reprend d'importantes sections d'un projet de loi du Congrès qui a l'appui des deux partis politiques et trouvera sa forme définitive vers la fin de l'année. Contrairement à la proposition du Président, toutefois, le projet de loi comporte une disposition permettant des importations non contingentées de textiles et d'articles d'habillement produits en Afrique, ce dont bénéficieraient des exportateurs comme Maurice et le Kenya, mais à laquelle s'oppose l'industrie américaine du vêtement et des tissus.Ìý