Jeunesse africaine cherche emplois
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Jeunesse africaine cherche emplois
C’est désormais avec un sentiment d’urgence que les dirigeants africains s’emploient à combattre le chômage des jeunes sur le continent et à mettre en place des programmes de création d’emplois. “En Afrique, le problème du chômage des jeunes est plus complexe que dans d’autres régions du monde, explique le Président du Kenya, Mwai Kibaki. Les économies dont la croissance est lente ne peuvent créer suffisamment d’emplois pour absorber le grand nombre de jeunes diplômés qui arrivent sur le marché chaque année”, a-t-il déclaré à Nairobi (Kenya) en septembre lors d’un sommet sur l’emploi des jeunes.
“Le résultat saute aux yeux dans les rues de nos grandes villes”, ajoute Mme Ngozi Okonjo-Iweala, qui a été jusqu’il y a peu Ministre des finances du Nigéria. “Des jeunes hommes et des jeunes femmes traînent dans les rues sans avoir grand chose à faire, conduisent des taxis-motos ... et dans certains cas se livrent à des activités criminelles."
D’après l’Organisation internationale du Travail (OIT), si l’on réduisait de moitié le taux de chômage des jeunes dans le monde, l’économie mondiale pourrait s’accroître de 2 200 à 3 500 milliards de dollars. Environ 20 % de cette croissance aurait lieu en Afrique subsaharienne.
Le sommet de Nairobi a été organisé par la Campagne YES, un réseau d’organisations à but non lucratif oeuvrant dans 60 pays de par le monde. À cette occasion, environ 2 000 jeunes, ainsi que des dirigeants de plus de 120 pays et des représentants d’organismes donateurs se sont réunis pour trouver des solutions.
De l’avis du Président Kibaki, les pays africains doivent impérativement adopter des programmes spécifiques en faveur des jeunes. La plupart des politiques de l’emploi ne tiennent pas compte des besoins particuliers des jeunes ni du fait que la création d’emplois pour les femmes présente souvent des difficultés spécifiques.
Le moment est venu d’agir
En 2003, les jeunes (de 15 à 24 ans) représentaient 63 % des chômeurs en Afrique subsaharienne, alors qu’ils ne constituaient que 33 % de la population active. Le taux de chômage déclaré est en moyenne de 10 % en Afrique, mais les chiffres sont en réalité beaucoup plus élevés, certains pays ayant des taux de chômage de plus de 40 %. Au Botswana, 43 % des jeunes étaient officiellement au chômage en 1998, contre 13 % des adultes. En Zambie, d’après les estimations récentes, le taux de chômage est de 30 % chez les adultes, contre 60 % chez les jeunes. Selon la définition de l’ONU, les “jeunes” sont ceux qui ont entre 15 à 24 ans, mais dans certains pays, cette tranche d’âge va parfois jusqu’à 35 ans.
Le chômage en Afrique s’explique par un ensemble complexe de facteurs, notamment la stagnation ou la morosité d’économies qui ne croissent pas assez rapidement pour produire suffisamment d’emplois pour une population en hausse. D’après des spécialistes du développement, il faudrait que l’économie africaine croisse de 7 % par an pour que l’on puisse réduire de moitié d’ici à 2015 le pourcentage de personnes vivant dans la pauvreté, objectif adopté par la communauté internationale. De nombreux pays ayant des industries précaires, le secteur manufacturier ne peut absorber à lui seul le grand nombre de chômeurs. Les faibles taux d’alphabétisation et les systèmes éducatifs qui ne dotent pas les jeunes des compétences nécessaires alimentent également le chômage.
Diverses politiques nationales de lutte à long terme contre le chômage ont été proposées, avec cependant des résultats limités. En septembre 2004, les dirigeants africains ont décidé d’adopter une stratégie à l’échelle du continent, le Plan d’action de Ouagadougou. Dans le cadre de ce plan adopté lors d’un sommet de l’Union africaine sur l’emploi organisé au Burkina Faso, les pays doivent diversifier leurs économies de façon à développer des industries à forte intensité de main-d’œuvre, adopter des lois qui attirent les investisseurs et créer des perspectives d’emploi pour les femmes et les jeunes.
“Le Plan d’action est un beau projet”, déclare le Secrétaire exécutif de la Commission économique pour l’Afrique de l’ONU, Abdoulie Janneh. “Mais nous devons dépasser le stade de la planification”, a-t-il dit lors de la conférence annuelle des ministres africains des finances, de la planification économique et du développement, tenue au Burkina Faso en mai 2006.
D’après l’UA, des progrès ont été réalisés depuis 2004 dans certains pays. “Le sommet de Ouagadougou a permis de lancer un certain nombre d’activités dans divers pays”, explique le Commissaire aux affaires économiques de l’UA, Maxwell Mkwezalamba. Par exemple, le Président du Mali, Amadou Toumani Touré, a déclaré que le chômage des jeunes était sa première priorité nationale ; le Ghana a inscrit à son budget de l’année 2006 110 millions de dollars destinés à un Programme national d’emploi des jeunes ; et, avec l’assistance de la Banque mondiale, l’Éthiopie élabore des politiques privilégiant la création d’emplois. M. Mkwezalamba signale que, entre autres pays, le Tchad et Madagascar ont établi des politiques nationales de l’emploi, tandis que le Président de la Tanzanie, Jakaya Kikwete, a chargé le Ministère de l’emploi de recenser les secteurs susceptibles d’accélérer la création de plus d’un million d’emplois par an.
Plans pour l’emploi
La plupart des pays n’ont toutefois pas intégré de programmes de création d’emplois à leurs cadres nationaux de développement. Les stratégies nationales comprennent des programmes de lutte contre la pauvreté, qui se fondent souvent sur les documents stratégiques de réduction de la pauvreté mis au point avec l’aide de la Banque mondiale et du Fonds monétaire international.
“Etant donné leur importance pour le développement des pays à faible revenu, les documents stratégiques de réduction de la pauvreté pourraient constituer un bon outil de promotion de l’emploi des jeunes”, commente M. Makha Dado Sarr, ancien Secrétaire exécutif adjoint de la CEA. Ces documents ont donné lieu dans les pays concernés à de grands programmes de développement.
La CEA et l’UA s’emploient à encourager les pays africains à intégrer les programmes en faveur de l’emploi aux documents stratégiques. La CEA a ainsi organisé en Egypte en mars 2006 une conférence d’examen des documents stratégiques. Les participants ont examiné 21 stratégies de réduction de la pauvreté et ont constaté que les deux tiers d’entre elles comprennent maintenant des mesures élémentaires de création d’emplois, ce qui représente une nette amélioration par rapport aux premiers documents stratégiques. Certaines de ces mesures visent à généraliser l’accès à l’éducation, à la formation et aux prêts, à construire une infrastructure et attirer les investisseurs. Mais, d’après la CEA, aucun de ces 21 documents stratégiques “ne s’attaquait explicitement et directement aux questions et problèmes d’emploi”.
Elargir les consultations
Lors de l’examen des documents stratégiques effectué au Caire, le programme de lutte contre la pauvreté de la Tanzanie a été cité en exemple parce qu’il est assorti d’objectifs quantifiables, de cibles précises et d’échéances. La Banque mondiale a approuvé le premier document stratégique de la Tanzanie en 2000. Bien que les documents stratégiques doivent être élaborés avec la participation des partenaires nationaux, les employeurs et travailleurs n’avaient guère eu droit au chapitre. Dans la deuxième stratégie définie en 2005, le Ministère du travail de la Tanzanie a, avec l’aide de l’OIT, tenu compte des recommandations de l’association nationale du patronat et des syndicats.
“Le peu d’importance accordé aux politiques de l’emploi dans les documents stratégiques témoigne probablement de la relative non-participation des ministères de l’emploi et de leurs partenaires sociaux aux consultations visant à élaborer les premiers documents stratégiques”, a noté l’OIT. Il reste à intégrer aux stratégies de réduction de la pauvreté des questions plus générales — par exemple, comment faire en sorte que la croissance économique se traduise par des emplois. Mais “cela changera probablement à mesure que les documents stratégiques évolueront”.
Selon le document stratégique actuel de la Tanzanie, le Gouvernement doit promouvoir des politiques favorables aux entreprises, proposer des prêts aux conditions avantageuses aux femmes pauvres qui créent leur activité professionnelle et encourager les petites et micro-entreprises. Mais à l’instar des autres documents stratégiques à l’examen, la stratégie de la Tanzanie ne considère pas le chômage des jeunes comme un problème spécifique appelant une attention particulière.
“Mauvaise politique”
Depuis le milieu des années 1990, l’économie de nombreux pays africains s’est considérablement améliorée, le taux de croissance annuelle moyenne du produit intérieur brut (PIB) n’ayant cessé d’augmenter, passant de moins de 3 % en 1998 à 5 % en 2005. En théorie, d’après de nombreux économistes, l’emploi aurait dû augmenter en conséquence.
Cependant, “dans la plupart de nos pays, note Mme Okonjo-Iweala, ancienne Ministre des finances du Nigéria, la croissance économique ne se traduit pas par d’importantes créations d’emploi ni par la réduction de la pauvreté”.
Ce manque d’emplois contribue à de nombreux problèmes sociaux. En l’absence d’autres perspectives, de nombreuses femmes et filles sont contraintes de se prostituer. Des études ont fait apparaître que les jeunes chômeurs vivant dans la rue risquent davantage que les jeunes qui ont un emploi de consommer des substances illicites ou de se joindre à des groupes armés.
“Une croissance sans emploi relève d’une mauvaise politique, non seulement sur le plan social, mais également sur le plan économique, affirme le Directeur général de l’OIT, Juan Somavia. Car cela affaiblit la consommation, intensifie les migrations et le travail des enfants et réduit la demande globale.” Ces problèmes entraînent la baisse des investissements, du financement des retraites, des recettes fiscales et d’autres ressources servant aux politiques sociales, et, à terme, une augmentation de la pauvreté.
Diversification
Le Réseau pour l’emploi des jeunes, un groupement de pays mis en place par le Secrétaire général de l’ONU, Kofi Annan, en collaboration avec les chefs de secrétariat de l’OIT et de la Banque mondiale, préconise que les gouvernements diversifient leurs économies et privilégient les secteurs qui emploient une main-d’œuvre importante. L’économie de nombre de pays africains dépend encore de la production d’une ou deux marchandises de base. Ils pourraient diversifier leurs activités, en transformant ces marchandises ou en développant l’industrie manufacturière légère, comme l’a fait Maurice avec succès.
Au cours des vingt dernières années, Maurice a enregistré un taux de croissance économique annuelle de 6 % en moyenne, ce qui a permis de multiplier par quatre le revenu par habitant et de quasiment éliminer le chômage. Le Gouvernement a attiré des investisseurs dans les principaux secteurs d’exportation du pays, le sucre et l’industrie vestimentaire. Il a également accentué la diversification en facilitant la création de zones franches industrielles, qui offrent des avantages aux investisseurs tout en permettant également aux travailleurs de former des syndicats (contrairement aux zones franches d’autres pays).
Entre 1983 et 1986, le nombre d’emplois a triplé dans les zones franches de Maurice, qui sont devenues en 1985 la première source d’exportations, de devises étrangères et d’emplois, devançant le secteur de la production sucrière. Aujourd’hui, Maurice a du mal à soutenir la concurrence d’autres pays producteurs de textiles comme la Chine. L’île restructure donc son économie, en privilégiant d’autres secteurs comme les services financiers, l’ingénierie légère, les plastiques de précision et les produits informatiques.
Education et formation
“Il est évident que pour sortir de la pauvreté, la population de notre continent a besoin d’emplois et d’éducation, déclare le Secrétaire exécutif de la CEA, M. Janneh. Pas n’importe quels emplois, mais des emplois qui procurent un salaire et des conditions de travail décents.” D’après la CEA, dont le siège se trouve à Addis-Abeba, il est essentiel que les pays développent la formation, l’éducation continue et l’enseignement, ainsi que d’autres moyens d’améliorer les compétences, en accordant une attention particulière aux jeunes.
D’après un rapport de l’OIT établi sous la direction de Francis Chigunta, maître de conférence à l’université de la Zambie, bon nombre de pays doivent dans un premier temps remettre en état un système éducatif qui s’est rapidement dégradé depuis plusieurs dizaines d’années, sous l’effet des réductions budgétaires effectuées à la demande de la Banque mondiale et du FMI. Ces politiques d’austérité, baptisées “ajustements structurels”, ont entraîné de fortes réductions des dépenses publiques, notamment en matière d’alimentation, de santé et d’éducation. De nombreuses écoles ont dû imposer des frais de scolarité, ce qui a contribué à la baisse de la fréquentation scolaire des enfants issus de milieux défavorisés.
De nombreux pays s’emploient actuellement, avec succès, à augmenter le taux de scolarisation. Les efforts visant spécifiquement à inscrire un plus grand nombre de filles à l’école devraient à terme améliorer les perspectives d’emploi des jeunes Africaines. D’autres études mettent l’accent sur l’inadéquation de nombreux systèmes éducatifs africains, qui cherchent avant tout à former des étudiants à des emplois de “col blanc” souvent inexistants.
Pour accroître les perspectives d’emploi du million de jeunes sortant chaque année du système scolaire et arrivant sur le marché du travail sans compétences adéquates, le Gouvernement égyptien a commencé en 1991 à fournir une formation technique et professionnelle aux élèves du secondaire qui, pendant trois ans, passent deux jours par semaine à l’école et quatre jours en formation dans une entreprise.
Entreprenariat
Une autre approche consiste à former à la création d’entreprise en dehors du système scolaire. Des programmes ont été mis en place à cette fin dans divers pays, dont la Gambie, le Kenya, le Malawi, le Nigéria, le Swaziland et le Zimbabwe. Les dirigeants estiment que la promotion de petites entreprises et du secteur informel permet d’apporter des solutions rapides au chômage.
Au Nigéria, qui comprend plus de 10 millions de petites entreprises, le Gouvernement apporte son soutien aux nouveaux entrepreneurs dans le cadre d’un réseau d’environ 20 centres de développement industriel qui forment les jeunes, les aident à convertir leurs idées en projets viables et leurs fournissent des prêts.
Mais beaucoup de ces programmes ne sont pas facilement accessibles aux femmes, fait observer Mme Christiana Okojie de l’Université du Bénin (Nigéria) : “Des études ont montré que les femmes ont tendance à moins en bénéficier.” Dans la file des chômeurs, les femmes arrivent en dernière place, car elles sont généralement moins instruites. Mme Okojie estime que les gouvernements devraient mettre en place des mesures de “discrimination positive” en faveur des pauvres et des femmes des régions rurales et établir des programmes de formation dans des secteurs où les femmes sont nombreuses à travailler.
Pour remédier à la situation, des femmes juristes, banquières, entrepreneurs et formatrices ont créé en 1981 le Kenya Women Finance Trust. C’est la seule institution de microfinancement du pays réservée aux femmes et elle compte plus de 100 000 membres. Elle accorde des prêts à des conditions avantageuses à des femmes à faible revenu qui peuvent ainsi créer leur propre activité professionnelle.
Travaux publics
Dans de nombreux pays, des solutions immédiates et à court terme s’imposent pour remédier au problème du chômage. Les projets de travaux publics constituent une solution souvent retenue. L’Afrique du Sud, qui affecte plus de 800 millions de dollars à des projets de ce type, a, d’après l’OIT, l’un des meilleurs programmes du continent.
Le Programme de travaux publics à base communautaire, conçu pour apporter une aide rapide et visible aux plus défavorisés, a permis de créer 130 000 emplois entre 1998 et 2004. Cette année-là, le Gouvernement a lancé le Programme renforcé de travaux publics, dans le but de créer un million d’emplois sur cinq ans. Ce programme emploie des travailleurs non qualifiés et semi-qualifiés pour construire des écoles, des hôpitaux et des routes et leur fournir un revenu à court terme et, espère-t-on, des compétences à long terme.
“Les travaux publics sont appréciés des politiciens car ils permettent à un gouvernement de dire qu’il ‘crée des emplois’ de façon plus directe et observable que par le biais opaque d’efforts de longue durée qui aboutissent à une croissance économique et des emplois véritables”, commente l’économiste sud-africaine Anna McCord.
Mais dans un contexte de pauvreté chronique, qui n’est ni cyclique ni temporaire, les projets de travaux publics n’auront pas d’effet important ou durable, ajoute-t-elle. Car les emplois ainsi créés sont de courte durée — 4 mois environ — et les salaires sont bas. Même si le programme de l’Afrique du Sud crée comme prévu 200 000 emplois par an, cela ne bénéficiera qu’à une infime partie de tous les pauvres et les chômeurs que compte le pays. Sur 45 millions d’habitants, 24 millions vivent au-dessous du seuil de la pauvreté.
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“Pour véritablement réduire la pauvreté, il faut que ce soient les pays africains qui décident de la marche à suivre”, explique le Vice-Président de la Banque mondiale pour la région Afrique, Gobind Nankani. “Les Africains savent mieux que quiconque où le bât blesse. Ils devraient définir leurs propres stratégies de réduction de la pauvreté en fonction des réalités nationales."
Mais bon nombre de pays africains se heurtent à l’incapacité de l’Etat à fournir des services sociaux. Les politiques de développement qu’ont suivies de nombreux pays africains pendant les années 1980 privilégiaient la prudence macroéconomique, ce qui a conduit à une réduction de la taille et du rôle du secteur public. Au Zimbabwe par exemple, le gouvernement a ordonné en 1995 à tous les ministères de réduire leurs effectifs de 40 %, pour satisfaire aux conditions d’un prêt de la Banque mondiale.
Il est aujourd’hui de plus en plus admis parmi les dirigeants africains et leurs partenaires de développement extérieurs que l’Etat doit être renforcé de façon à pouvoir participer activement au développement.
M. Nankani note qu’il serait dans l’intérêt des gouvernements africains de favoriser les investissements dans les zones rurales. Les deux tiers des Africains vivent en milieu rural et la pauvreté est majoritairement un phénomène rural. La plupart des habitants pauvres des campagnes pratiquent l’agriculture de subsistance à petite échelle et travaillent dans l’agro-alimentaire. Les gouvernements pourraient donc promouvoir des politiques visant à augmenter la productivité agricole et la croissance.
Pour les entreprises
A court terme, les pays doivent supprimer les politiques qui font obstacle aux investissements, note la Banque mondiale dans le rapport intitulé Doing Business in 2006: Creating Jobs. D’après la Banque, les pays africains imposent aux entrepreneurs les réglementations les plus contraignantes. Au Mozambique, un investisseur doit effectuer 14 démarches distinctes pendant 153 jours en moyenne pour déclarer une entreprise, tandis qu’en Sierra Leone, une société peut avoir à payer en taxes professionnelles une somme équivalente à 164 % de ses bénéfices bruts.
Le rapport classe les réformes effectuées par 155 pays en vue d’attirer les investisseurs. Parmi les pays cités en exemple figure le Rwanda, qui a réformé ses tribunaux et ses procédures douanières. Le Mozambique est également à l’honneur pour avoir réduit les droits de mutation de 10 à 2,4 % de la valeur des biens, la plus grande réduction de ce type dans le monde.
Les pays africains doivent faire le ménage chez eux, affirme M. Nankani. Il ne pourra y avoir de croissance économique ni de création d’emplois dans les pays où les politiques des pouvoirs publics “étranglent les entreprises privées et découragent les entrepreneurs”.
Le chômage menace la paix et la sécurité
Dans un certain nombre de pays africains, le chômage des jeunes s’inscrit dans un cercle vicieux. Les jeunes chômeurs risquent davantage de gonfler les rangs des mouvements rebelles, des armées et des milices pro-gouvernementales qui s’affrontent lors des nombreuses guerres du continent. La guerre ne fait ensuite qu’aggraver le chômage, du fait de son impact sur l’économie, l’infrastructure et les ressources humaines.
Il s’agit donc de mettre fin à ce cercle vicieux, déclare Joseph Legwaila, Secrétaire général adjoint de l’ONU et conseiller spécial pour l’Afrique. Pour cela, il est indispensable que les jeunes soient occupés de façon productive.
Dans les pays africains sortant d’une guerre, les forces de maintien de la paix de l’ONU essaient d’instaurer une paix durable au moyen de programmes de désarmement, de démobilisation et de réinsertion. En Sierra Leone, la guerre a cessé en 2002 et l’ONU a apporté son soutien à la réinsertion de 48 000 anciens combattants. Cependant, il est très difficile de créer des emplois dans l’un des pays les plus pauvres du monde. Plus de 50 % des jeunes Sierra-léonais n’ont toujours pas de travail digne de ce nom.
Le Libéria connaît une situation aussi difficile et cherche à donner du travail à ses 100 000 jeunes ex-combattants. Nombre d’entre eux participent aux programmes de réinsertion qui leur permettent de suivre une formation et de revenir dans leur communauté, indique la Présidente, Ellen Johnson-Sirleaf. Il s’agit maintenant de les doter de projets à long terme ou de les scolariser, pour qu’à la fin du programme en cours, “ils ne se retrouvent pas au chômage, dans un état d’impuissance”.
Dans un rapport récent de l’ONU sur le chômage des jeunes et l’insécurité en Afrique de l’Ouest, le taux de chômage élevé des jeunes des deux sexes dans cette région est qualifié de “bombe à retardement”. D’après cette analyse réalisée par le Bureau de l’ONU pour l’Afrique de l’Ouest, les progrès et la sécurité de toute la région sont menacés par “le nombre croissant de jeunes qui n’ont aucune possibilité de pouvoir un jour gagner leur vie correctement”.
Les préoccupations des jeunes et leur contribution potentielle au développement n’ont pas suffisamment retenu l’attention des dirigeants africains. Pour remédier à cette lacune, le Bureau du Conseiller spécial pour l’Afrique que dirige M. Legwaila, organisera en novembre une réunion régionale en Namibie. Des jeunes et des experts de la région y débattront de la réinsertion des jeunes ex-combattants, ainsi que de la création d’emplois et de l’accès à des services de base, comme l’eau, la santé et l’éducation.