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Un nouveau mod¨¨le de financement pourrait aider l'Afrique ¨¤ se relever du COVID-19 et ¨¤ s'attaquer ¨¤ la dette

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Un nouveau mod¨¨le de financement pourrait aider l'Afrique ¨¤ se relever du COVID-19 et ¨¤ s'attaquer ¨¤ la dette

Les dirigeants mondiaux cherchent des moyens d'aider l'Afrique ¨¤ stimuler la croissance ¨¦conomique, discutent des droits de tirage sp¨¦ciaux et de l'esprit d'entreprise.
Afrique Renouveau: 
6 Octobre 2021
F¨¦lix Tshisekedi (¨¤ gauche) et Emmanuel Macron se serrant la main lors du Sommet.
Sara Canals
F¨¦lix Tshisekedi (¨¤ gauche) et Emmanuel Macron se serrant la main lors du Sommet.

Lorsque plus de 30 chefs d'?tat africains, d'autres dirigeants mondiaux et des repr¨¦sentants d'organisations internationales - la Banque mondiale, le Fonds mon¨¦taire international (FMI), la Banque europ¨¦enne d'investissement, la Banque africaine de d¨¦veloppement et d'autres - se sont r¨¦unis au Grand Palais ?ph¨¦m¨¨re ¨¤ Paris pour un sommet sur le financement des ¨¦conomies africaines au milieu de cette ann¨¦e, l'enjeu ¨¦tait de taille.?

Les dirigeants ont explor¨¦ les moyens de stimuler la croissance ¨¦conomique et de rem¨¦dier aux difficult¨¦s caus¨¦es par la COVID-19 en Afrique.

Ils ont notamment discut¨¦ de la dette de l'Afrique, qui a consid¨¦rablement augment¨¦ depuis le d¨¦but de la pand¨¦mie, plongeant la r¨¦gion dans la pire r¨¦cession depuis plus d'un demi-si¨¨cle.?

Le sommet, qui s'est tenu le 18 mai, a ¨¦galement permis d'identifier les moyens de favoriser l'esprit d'entreprise et d'¨¦voquer la n¨¦cessit¨¦ d'un acc¨¨s accru aux vaccins COVID-19 dans la r¨¦gion.?

Droits de tirage sp¨¦ciaux

Pour stimuler la croissance ¨¦conomique sans alourdir le fardeau d¨¦j¨¤ pr¨¦caire de la dette, les dirigeants ont envisag¨¦, pour la premi¨¨re fois dans l'histoire, la possibilit¨¦ pour les ¨¦conomies avanc¨¦es de faire don de leurs quotas de r¨¦serves du FMI, appel¨¦s droits de tirage sp¨¦ciaux (DTS), aux ¨¦conomies en d¨¦veloppement, dont la plupart se trouvent en Afrique.?

Conf¨¦rence de presse avec Kristalina Georgieva, Macky Sall, Emmanuel Macron et F¨¦lix Tshisekedi. Photo : Sara Canals

Les DTS sont un panier des cinq principales devises du monde (le dollar am¨¦ricain, l'euro, le yuan chinois, le yen japonais et la livre sterling) utilis¨¦ par les membres du FMI pour stimuler les liquidit¨¦s dans les pays sans alourdir le fardeau de leur dette.?

L'id¨¦e d'utiliser les DTS des grandes ¨¦conomies pour soutenir les pays en d¨¦veloppement ¨¦tait une bonne nouvelle pour les dirigeants africains pr¨¦sents au sommet.

Le 23 ao?t, le FMI a annonc¨¦ des allocations de DTS d'une valeur d'environ 650 milliards de dollars - un montant sans pr¨¦c¨¦dent, presque trois fois sup¨¦rieur aux 250 milliards de dollars de DTS qui ont ¨¦t¨¦ allou¨¦s aux pays en 2009 ¨¤ la suite de la crise financi¨¨re mondiale.

"La [derni¨¨re] allocation profitera ¨¤ tous les membres, car elle r¨¦pondra au besoin mondial ¨¤ long terme de r¨¦serves, renforcera la confiance et favorisera la r¨¦silience et la stabilit¨¦ de l'¨¦conomie mondiale. Elle aidera particuli¨¨rement nos pays les plus vuln¨¦rables qui luttent pour faire face ¨¤ l'impact de la crise de la COVID-19", indique le FMI sur son site internet.

Il s'agit de "la plus importante [allocation] de notre histoire", selon la directrice g¨¦n¨¦rale du FMI, Kristalina Georgieva.

Toutefois, sur les 650 milliards de dollars de DTS, seuls 33,6 milliards sont affect¨¦s ¨¤ l'Afrique, un montant qui, selon de nombreuses personnes, ne correspond pas aux besoins du continent, ce qui souligne la n¨¦cessit¨¦ de s'appuyer sur les DTS des puissances ¨¦conomiques.

"Ce n'est pas suffisant", d¨¦clare le pr¨¦sident fran?ais Emmanuel Macron, en faisant r¨¦f¨¦rence aux 33,6 milliards de dollars.

"33 milliards de dollars pour 55 pays, c'est une goutte d'eau", abonde Macky Sall, pr¨¦sident du S¨¦n¨¦gal.

Dans son discours devant la 76e session de l'Assembl¨¦e g¨¦n¨¦rale des Nations Unies (ONU), le 21 septembre, le secr¨¦taire g¨¦n¨¦ral Ant¨®nio Guterres a salu¨¦ "l'¨¦mission de 650 milliards de dollars de DTS par le FMI", mais a exhort¨¦ les grandes ¨¦conomies ¨¤ "r¨¦affecter leurs DTS exc¨¦dentaires aux pays qui en ont besoin."

M. Guterres a d¨¦clar¨¦ que de nombreux pays en d¨¦veloppement avaient un besoin urgent de liquidit¨¦s et a d¨¦plor¨¦ qu'une grande partie des DTS aille "aux pays qui en ont le moins besoin."

Le pr¨¦sident Macron a annonc¨¦ que la France ferait don de son quota de DTS et a encourag¨¦ les autres pays ¨¤ suivre son exemple. "Nous sommes pr¨ºts, et le Portugal est pr¨ºt. Nous devons atteindre jusqu'¨¤ 100 milliards de dollars pour l'Afrique et tripler ensemble le montant des DTS allou¨¦s au continent", a-t-il d¨¦clar¨¦ lors du sommet de Paris.

La quote-part de la France s'¨¦l¨¨ve ¨¤ environ 27,5 milliards de dollars, tandis que celle du Portugal est de 2,8 milliards de dollars.?

Carlos Lopes, ancien secr¨¦taire ex¨¦cutif de la Commission ¨¦conomique des Nations Unies pour l'Afrique (CEA), f¨¦licite la France d'avoir pris l'initiative. Il a d¨¦clar¨¦ ¨¤ Afrique Renouveau : "Traditionnellement, un pays donateur pr¨ºte de l'argent ou donne de l'aide. Le fait que la France ait d¨¦cid¨¦ de donner son quota de DTS est important. Nous parlons d'un membre du G7".?

Nonobstant, M. Lopes, aujourd'hui professeur ¨¤ l'?cole de gouvernance publique Nelson Mandela de l'Universit¨¦ du Cap, est sceptique quant ¨¤ la possibilit¨¦ d'atteindre l'objectif de 100 milliards de dollars de DTS suppl¨¦mentaires pour l'Afrique. "Ses intentions [le pr¨¦sident Macron] sont bonnes mais aussi trop ambitieuses. Il n'a pas le pouvoir de rassembler un tel montant", a not¨¦ M. Lopes.?

Il a ¨¦galement expliqu¨¦ : "La conf¨¦rence n'a pas produit l'effet escompt¨¦ par M. Macron : La France n'a r¨¦ussi ¨¤ convaincre que le Portugal, qui ¨¦tait probablement sous pression car il occupait la pr¨¦sidence tournante de l'UE [au moment du sommet]. Mais les autres pays n'ont pas suivi."

Vera Songwe, sous-secr¨¦taire g¨¦n¨¦rale des Nations Unies et secr¨¦taire ex¨¦cutive de la CEA, a d¨¦clar¨¦ ¨¤ Afrique Renouveau que la r¨¦union de Paris ¨¦tait importante pour poursuivre "la conversation et pousser ¨¤ la r¨¦trocession des DTS", qui "aideront les pays les plus pauvres ¨¤ acqu¨¦rir des vaccins" et soutiendront finalement la croissance ¨¦conomique.?

Comment des DTS d'une valeur de 100 milliards de dollars pourraient-ils aider les ?tats africains ?

Ils permettraient ¨¤ l'Afrique "d'acheter plus de vaccins, de financer la relance ¨¦conomique du continent, de former les jeunes et de cr¨¦er des entreprises, de restructurer et de r¨¦duire notre dette", selon le pr¨¦sident Macky Sall.

F¨¦lix Tshisekedi s'adressant ¨¤ un journaliste apr¨¨s le Sommet. Photo : Sara Canals

Le PIB de l'Afrique s'est contract¨¦ de 1,9 % en 2020. M¨ºme si le continent devrait conna?tre une croissance de 3,2 % en 2021, cette croissance est inf¨¦rieure ¨¤ la pr¨¦vision de croissance mondiale de 6 %, note le FMI.?

Le FMI pr¨¦voit que l'Afrique a besoin de 285 milliards de dollars suppl¨¦mentaires jusqu'en 2025 "pour une r¨¦ponse ad¨¦quate au COVID-19".?

Une initiative en faveur de l'esprit d'entreprise

Outre les DTS, le sommet de Paris a abord¨¦ la question de l'entrepreneuriat, la France ayant annonc¨¦ la cr¨¦ation de "l'Alliance pour l'entrepreneuriat en Afrique" pour soutenir le secteur priv¨¦ africain et promouvoir l'entrepreneuriat. "Elle mobilisera un milliard de dollars pour les petites et moyennes entreprises", a d¨¦clar¨¦ M. Macron.

Mme Songwe qualifie l'initiative en faveur de l'entrepreneuriat de d¨¦veloppement positif, ajoutant : "Entre 70 et 80 % des ¨¦conomies africaines sont constitu¨¦es de petites et moyennes entreprises. Nous envisageons des DTS de plusieurs milliards de dollars, mais ces milliards finissent par retomber sur les petites entreprises. Ce type d'alliances peut contribuer ¨¤ stimuler la croissance."?

L'Alliance pour l'entreprenariat en Afrique "aidera les jeunes Africains, les petites entreprises et les femmes, en leur donnant les moyens et la possibilit¨¦ de jouer un r?le plus important dans notre soci¨¦t¨¦", d¨¦clare F¨¦lix Tshisekedi, pr¨¦sident de la R¨¦publique d¨¦mocratique du Congo et pr¨¦sident de l'Union africaine (UA). "L'espoir de notre continent, c'est la jeunesse, et nous devons nous concentrer sur elle."?

M. Tshisekedi a sugg¨¦r¨¦ d'organiser la premi¨¨re r¨¦union de l'Alliance ¨¤ Kinshasa, avant la fin de son mandat de pr¨¦sident de l'UA, d¨¦but 2022.

Les appels ¨¤ la coop¨¦ration internationale pour r¨¦soudre le probl¨¨me de la dette de l'Afrique se sont intensifi¨¦s l'ann¨¦e derni¨¨re, apr¨¨s l'apparition de la pand¨¦mie. Le 15 avril 2020, 18 dirigeants africains et europ¨¦ens ont publi¨¦ un ¨¦ditorial soulignant la n¨¦cessit¨¦ de stimuler la r¨¦ponse sanitaire d'urgence de l'Afrique.

Les espoirs d'une bou¨¦e de sauvetage ¨¦conomique pour l'Afrique sont grands, mais les d¨¦fis sont tout aussi grands. Convaincre d'autres pays d¨¦velopp¨¦s de faire don de leurs DTS aux pays en d¨¦veloppement pourrait potentiellement changer la donne, mais c'est aussi une demande difficile. Et l'initiative de M. Macron en mati¨¨re d'entrepreneuriat devrait jouer un r?le de catalyseur.?

Le dirigeant fran?ais est toutefois optimiste, estimant que des bases solides sont d¨¦j¨¤ pos¨¦es "pour un nouveau mod¨¨le de croissance" pour l'Afrique. Le temps nous dira s'il a raison.

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