Le concept de mondialisation est au centre de presque toutes les discussions ou de tous les articles ayant trait aux relations internationales, ¨¤ la macro-¨¦conomie ou aux probl¨¨mes sociaux. La seule raison pour laquelle le terme ne s¡¯est pas banalis¨¦ est qu¡¯il s¡¯applique ¨¤ tout ce qui se passe d¡¯important dans ce mill¨¦naire.

Nous ressentons les forces de la mondialisation ¨¤ des rythmes diff¨¦rents et les percevons dans des laps de temps diff¨¦rents. Nous sommes dans un monde dirig¨¦ par les multinationales depuis des d¨¦cennies et satur¨¦ par les m¨¦dias populaires, la t¨¦l¨¦vision et la publicit¨¦. Plus r¨¦cemment, les technologies de l¡¯information et de la communication (TIC) ont instantan¨¦ment transform¨¦ la mani¨¨re dont nous partageons les connaissances et travaillons. La plupart d¡¯entre nous sommes encore admiratifs de la rapidit¨¦ ¨¤ laquelle cette r¨¦volution s¡¯est propag¨¦e.

J¡¯ai d¨¦but¨¦ ma carri¨¨re dans les relations internationales avec le Conseil britannique ¨¤ Kano, au Nigeria, il y a 30 ans. Mon seul moyen de communication ¨¦tait le talkie-walkie qui me reliait ¨¤ Lagos, une fois par jour. Des lettres de travail dactylographi¨¦es ¨¦taient envoy¨¦es une fois par semaine vers Londres dans un sac de courrier et les r¨¦ponses m¡¯¨¦taient envoy¨¦es quinze jours plus tard. Aujourd¡¯hui, je m¡¯attends ¨¤ recevoir en quelques minutes les r¨¦ponses aux emails de nos coll¨¨gues de Kano que j¡¯ai envoy¨¦s de Washington. Sinon, je les joins sur mon t¨¦l¨¦phone portable. Presque tous les habitants des villes partagent une exp¨¦rience similaire.

Plus g¨¦n¨¦ralement, les forces de la mondialisation ont transform¨¦ les moyens et les modes par lesquels nous collaborons ¨¤ l¡¯examen des questions mondiales. Le recours massif aux communications et leur importance croissante signifient que nous devons pr¨¦figurer la ?? communaut¨¦ mondiale ? comme le tout dernier groupe, rejoignant les autres communaut¨¦s vari¨¦es et plurielles auxquelles nous appartenons. Les communaut¨¦s sont des soci¨¦t¨¦s aux int¨¦r¨ºts communs. Elles sont g¨¦n¨¦ralement locales, une source? de? r¨¦confort et de soutien et permettent de donner un sentiment partag¨¦ d¡¯identit¨¦ ¨¤ des individus dont le bien-¨ºtre est am¨¦lior¨¦ et assur¨¦ par cette reconnaissance d¡¯une cause commune. Avec l¡¯¨¦largissement de la port¨¦e de la communication et de l¡¯interd¨¦pendance, le concept de communaut¨¦ s¡¯est ¨¦galement ¨¦largi sur les plans g¨¦ographique et d¨¦mographique. Il s¡¯applique aux r¨¦gions ethniques, aux diasporas et aux fronti¨¨res nationales. Dans un sens plus large, c¡¯est aujourd¡¯hui la communaut¨¦ transnationale qui est au c?ur des relations internationales modernes. La Communaut¨¦ europ¨¦enne en est peut-¨ºtre le meilleur exemple et les Nations Unies sont le t¨¦moignage explicite de cette d¨¦termination. Le futur bien-¨ºtre mondial d¨¦pendra de notre capacit¨¦ ¨¤ renforcer l¡¯engagement de la plan¨¨te aux protocoles ainsi que la motivation et, surtout, la volont¨¦ de reconna?tre la n¨¦cessit¨¦ de faire de la communaut¨¦ mondiale une soci¨¦t¨¦ mondiale singuli¨¨re ayant des int¨¦r¨ºts communs.

En 2013, toutes les questions politiques, ¨¦conomiques, environnementales ou sociales ont un impact international et requi¨¨rent donc un discours, des n¨¦gociations, une r¨¦ponse et un engagement mondiaux. Les questions locales li¨¦es au d¨¦veloppement, ¨¤ la prosp¨¦rit¨¦ et ¨¤ la s¨¦curit¨¦, au travail et aux loisirs, aux droits et aux valeurs d¨¦passent invariablement le niveau local et ont des implications ¨¤ l¡¯¨¦chelle r¨¦gionale, nationale, transnationale et mondiale. En 2013, nul ¨ºtre humain n¡¯est une ?le. En fait, aucune ?le n¡¯est une ?le.

Un imp¨¦ratif est associ¨¦ ¨¤ l¡¯impact vertigineux de la mondialisation. Le sentiment d¡¯ins¨¦curit¨¦ et de m¨¦fiance ressenti partout dans le monde depuis les ¨¦v¨¦nements du 11 septembre 2001 met en avant la question cruciale li¨¦e au bien-¨ºtre, ¨¤ la prosp¨¦rit¨¦, ¨¤ la s¨¦curit¨¦ internationales et m¨ºme ¨¤ la survie pour une race humaine dispers¨¦e qui commence ¨¤ se conna?tre avec une nouvelle et inhabituelle singularit¨¦. Comment nos cultures, nos soci¨¦t¨¦s et nos communaut¨¦s collaborent-elles pour examiner les probl¨¨mes mondiaux sans sacrifier leurs? diversit¨¦s inh¨¦rentes qui les identifient et renforcent leurs cultures ? En d¡¯autres termes, comment le global peut-il ¨ºtre anim¨¦ parle local ? Quels droits, quel les valeurs et quels comportements devons-nous consid¨¦rer comme universels pour que les autres aspects b¨¦nins de nos diverses cultures ne soient pas seulement tol¨¦r¨¦s, mais c¨¦l¨¦br¨¦s de mani¨¨re distincte ? Ou bien, pour revenir ¨¤ nos anciens philosophes, comment pouvons-nous ¨C les 7 milliards d¡¯entre nous ¨C continuer ¨¤ mener une vie satisfaisante ?

Au c?ur de ces questions r¨¦side une nouvelle dimension de la mondialisation.? Ces? derni¨¨res ann¨¦es, nous avons connu une mondialisation acc¨¦l¨¦r¨¦e de l¡¯¨¦ducation, en particulier dans les domaines des connaissances, des aptitudes et du professionnalisme pris? en compte dans le? concept? de ? l¡¯enseignement sup¨¦rieur international ?. Il s¡¯agit d¡¯un aspect de la mondialisation qui est d¨¦termin¨¦ par la d¨¦mocratisation g¨¦n¨¦ralis¨¦e ax¨¦e sur la carri¨¨re et qui utilise les TIC pour contester et passer outre un certain nombre d¡¯hypoth¨¨ses sur la transmission traditionnelle des connaissances. Ce nouvel aspect de la mondialisation, caract¨¦ris¨¦ par la flexibilit¨¦, la mobilit¨¦ et la facilit¨¦ d¡¯acc¨¨s, offre des chances ¨¤ tous.

Dans ce contexte, le terme ? universit¨¦ ? semble avoir trouv¨¦ sa base et son sens. Les universit¨¦s, des institutions d¨¦di¨¦es ¨¤ l¡¯acquisition des connaissances, ¨¤ la recherche, ¨¤ l¡¯apprentissage et (fondamentalement, ¨¦tant donn¨¦ l¡¯empi¨¦tement du virtuel) ¨¤ l¡¯exp¨¦rience, ont la capacit¨¦ de d¨¦fendre le caract¨¨re universel de leur intention et de leur offre. L¡¯universalit¨¦ du contenu, de la forme et du groupe d¡¯int¨¦r¨ºt. Par le contenu, les universit¨¦s reconnaissent qu¡¯elles ont la responsabilit¨¦ d¡¯¨¦tudier les questions mondiales en regroupant les programmes interdisciplinaires de r¨¦flexion et de recherche. Par la forme, les universit¨¦s ¨¦largissent leurs limites locales et nationales pour accueillir, par des outils virtuels et une pr¨¦sence transnationale, davantage de territoires universels. Et par le groupe d¡¯int¨¦r¨ºt, les universit¨¦s ¨¦clair¨¦es s¡¯assurent que les politiques d¡¯acc¨¨s et d¡¯inclusion encouragent les bourses d¡¯¨¦tudes ind¨¦pendamment du milieu social et des moyens financiers des ¨¦tudiants et avec un profil international pour faire de chaque campus international un mini laboratoire d¡¯id¨¦es des nations r¨¦unies.

Si le terme ? universit¨¦ ? rev¨ºt un sens dynamique nouveau, le terme ? ¨¦ducation ? aussi. Enseigner ne signifie pas inculquer des connaissances et des informations aux ¨¦tudiants, mais d¨¦velopper leurs comp¨¦tences et leurs capacit¨¦s ¨C en trouvant par l¡¯inspiration et l¡¯imagination les moyens de leur offrir de meilleures opportunit¨¦s et de se r¨¦aliser. Au niveau de l¡¯enseignement sup¨¦rieur, cette opportunit¨¦ n¡¯est pas seulement celle de l¡¯emploi et de la carri¨¨re, m¨ºme si le d¨¦veloppement de l¡¯employabilit¨¦ demeure un objectif principal de l¡¯¨¦ducation. Les comp¨¦tences que l¡¯enseignement sup¨¦rieur d¨¦veloppe chez les ¨¦tudiants ont principalement trait ¨¤ une prise de conscience croissante de leur identit¨¦ et de leur place dans le monde o¨´ ils vivent. Car ce sont aussi des attributs de la mondialisation; dans ce cas, la mondialisation de la personne et le sentiment plus m?r de l¡¯¨¦tudiant de ce que signifie ¨ºtre un citoyen du monde.

Les universit¨¦s innovantes r¨¦alisent aujourd¡¯hui qu¡¯elles doivent ¨ºtre des centres dynamiques mondiaux permettant de mieux comprendre le d¨¦veloppement et la transformation des questions li¨¦es au global et au local. Nos universit¨¦s d¨¦tiennent le corps professoral interdisciplinaire et les connaissances permettant de cr¨¦er des lieux propices ¨¤ la r¨¦flexion et ¨¤ la recherche et de fournir un encadrement professionnel afin de d¨¦terminer les mesures intelligentes et ¨¦clair¨¦es qu¡¯il faut prendre pour r¨¦pondre aux questions mondiales comme le d¨¦veloppement, la destruction de l¡¯environnement, les droits de l¡¯homme, le changement climatique, la m¨¦decine, la r¨¦duction de la pauvret¨¦, l¡¯urbanisation, la s¨¦curit¨¦, les tensions entre les cultures, l¡¯employabilit¨¦, la consolidation de la paix et d¡¯autres questions qui affluent chaque jour dans les bulletins d¡¯information. Le succ¨¨s d¡¯une universit¨¦ moderne sera de plus en plus d¨¦termin¨¦ par sa capacit¨¦ ¨¤ traiter ces questions au sein d¡¯un cadre mondial tout en contextualisant culturellement ces m¨ºmes questions en comprenant les prismes locaux ¨¤ travers lesquels la recherche doit briller.

La mondialisation de l¡¯enseignement sup¨¦rieur met aussi en cause le compartimentage traditionnel de l¡¯acquisition des connaissances. Notre sujet d¡¯¨¦tudes ultime est la condition et l¡¯exp¨¦rience humaines dans le monde physique de la plan¨¨te o¨´ nous vivons et dans le monde m¨¦taphysique de l¡¯exp¨¦rience existentielle qui nous d¨¦finit. Chaque sujet d¡¯¨¦tudes doit donc conna?tre son but dans un domaine de connaissances et de recherche plus int¨¦gr¨¦. Il est indiscutable qu¡¯il est utile de cat¨¦goriser la recherche et les connaissances dans une typologie dans les domaines des sciences, de la technologie, de l¡¯ing¨¦nierie et des math¨¦matiques (STEM), des sciences sociales et des sciences humaines. Bien que la m¨¦thodologie des disciplines universitaires leur soit propre, leurs contenus sont proches. Ce serait une erreur de penser que ces disciplines sont enti¨¨rement diff¨¦rentes les unes des autres. Il est essentiel de relier de plus en plus les sciences humaines, les sciences sociales et les sciences afin d¡¯avoir une? meilleure? compr¨¦hension des questions? mondiales li¨¦es au d¨¦veloppement. Un probl¨¨me d¡¯eau au Mali ou de nutrition au Bangladesh peut n¨¦cessiter le point de vue de l¡¯historien, du th¨¦ologien et du psychologue autant que de l¡¯agriculteur, de l¡¯ing¨¦nieur et de l¡¯¨¦conomiste.

Faire des ¨¦tudes est, dans un sens tr¨¨s litt¨¦ral, un acte de distinction. La recherche d¨¦compose les choses, les d¨¦monte, explore les diverses parties d¡¯un syst¨¨me et cherche ¨¤ cr¨¦er un point de vue distinctif et divers l¨¤ o¨´ il y avait ignorance, confusion ou une fausse singularit¨¦. L¡¯¨¦ducation permet donc de mieux identifier la diversit¨¦ et de d¨¦velopper une plus grande tol¨¦rance ¨¤ la diff¨¦rence. C¡¯est l¡¯universit¨¦ qui est la garantie de cette vision internationale, interculturelle et interdisciplinaire, et les meilleures universit¨¦s cr¨¦ent elles-m¨ºmes un corps d¡¯¨¦tudiants et d¡¯enseignants multiculturels et multinationaux. Pour l¡¯¨¦tudiant, il ne peut y avoir de meilleur catalyseur que de travailler et de faire des ¨¦tudes ¨¤ l¡¯¨¦tranger dans un cadre accueillant, mais diff¨¦rent. Cette exp¨¦rience du d¨¦placement, esp¨¦rons-le agr¨¦able, mais parfois difficile, contribue ¨¤ l¡¯¨¦panouissement des valeurs humaines et de la condition humaine que nous partageons tous tout en testant dans un contexte ¨¦tranger et diff¨¦rent les aspects distinctifs qu¡¯il a h¨¦rit¨¦s de sa culture et de sa religion. Le r?le d¡¯une bonne universit¨¦ est de nous permettre de comprendre comment vivre dans une soci¨¦t¨¦ plurielle et tol¨¦rante dans un monde globalis¨¦.?? ?