缅北禁地

Ibrahim Assane Mayaki, Pr茅sident du Secr茅tariat du NEPAD, affirme que 鈥�'le programme NEPAD demeure tr猫s pertinent pour les d茅fis de d茅veloppement auxquels le continent est confront茅.'鈥�

Photograph: ONU / Paulo Filgueiras

En 2001, un sommet des dirigeants africains a adopt茅 le Nouveau Partenariat pour le d茅veloppement de l鈥橝frique (NEPAD) comme un projet global de d茅veloppement 脿 long terme social et politique du continent. Le Pr茅sident du Secr茅tariat du NEPAD est Ibrahim Assane Mayaki, ancien premier ministre du Niger, qui a pris ses fonctions en avril. Dans cet entretien exclusif accord茅 脿 Afrique Renouveau, M. Mayaki 茅voque les progr猫s accomplis par le NEPAD et les difficult茅s qui se profilent 脿 l鈥檋orizon du programme de d茅veloppement de l鈥橴nion africaine.

Vous avez particip茅 脿 la r茅union de septembre 2009 du Groupe des 20 (G-20) 脿 Pittsburg, convoqu茅e pour envisager de nouvelles interventions face 脿 la crise 茅conomique mondiale. Est-ce que certaines des pr茅occupations particuli猫res 脿 l鈥橝frique ont 茅t茅 abord茅es 脿 cette occasion?

L鈥檜ne des priorit茅s de l鈥橝frique est l鈥檃griculture. Cette priorit茅 est largement accept茅e par la communaut茅 internationale, ce secteur 茅tant per莽u comme le principal point de d茅part dans la lutte contre la pauvret茅. Cela n鈥檃 pas toujours 茅t茅 le cas. Mais compte tenu du fait que la plupart des habitants du continent vivent dans les zones rurales et que l鈥檃griculture constitue leur principale activit茅, la majorit茅 des experts et des non-experts ont conclu que si l鈥檕n voulait stimuler leurs revenus, il fallait privil茅gier le d茅veloppement agricole. Cela a 茅t茅 r茅affirm茅 脿 Pittsburg, et la Banque mondiale a 茅t茅 charg茅e de la constitution d鈥檜n fonds d鈥檃ffectation sp茅ciale multidonateurs r茅serv茅 exclusivement au Programme int茅gr茅 pour le d茅veloppement agricole de l鈥橝frique (CAADP), organisme cr茅茅 par le NEPAD et adopt茅 par l鈥橴nion africaine. Pittsburg a 茅galement r茅affirm茅 l鈥檈ngagement de la r茅union du Groupe des Huit (G-8) 脿 l鈥橝quila [Italie, en juillet], en faveur de la mise en place d鈥檜n m茅canisme de financement agricole. A l鈥橝quila, l鈥檕bjectif a 茅t茅 de d茅gager 20 milliards de dollars 脿 cette fin. La volont茅 est donc bien l脿. La difficult茅 脿 pr茅sent est d鈥檃ssurer le financement judicieux du CAADP.

Avant la crise 茅conomique actuelle, l鈥橝frique a 茅t茅 frapp茅e par une augmentation sensible des prix alimentaires. Il y a eu des protestations et de grandes souffrances.听 Est-ce qu鈥檌l s鈥檃git d鈥檜n coup de semonce pour les gouvernements africains, pour les inciter 脿 investir davantage dans les secteurs agricole et alimentaire?

Les chefs d鈥橢tats africains s鈥櫭﹖aient d茅j脿 donn茅s pour objectif de consacrer 10% de l鈥檃rgent public 脿 ces secteurs. A vrai dire, cet objectif n鈥檃 pas 茅t茅 atteint convenablement. La plupart des pays qui s鈥檈n rapprochent sont stables sur le plan politique et bien administr茅s par des gouvernements d茅mocratiquement 茅lus. G茅n茅ralement, ce sont les bons syst猫mes de gouvernement et les institutions politiques stables qui formulent des strat茅gies agricoles judicieuses.

Lorsqu鈥檕n regarde les 茅meutes alimentaires qui ont 茅clat茅 les deux derni猫res ann茅es, qu鈥檈n disent les rapports de police? Que la plupart des participants ont moins de 20 ans, qu鈥檌ls sont au ch么mage, sont originaires des r茅gions rurales et n鈥檃ppartiennent 脿 aucun parti politique ou syndicat. C鈥檈st cette jeunesse, et 50% de nos populations ont moins de 20 ans, qui d茅terminera l鈥檃venir de nos 茅conomies, de nos institutions politiques et de nos syst猫mes de gouvernement. Le choix est tr猫s simple听: ou bien les gouvernements africains s鈥檃ttaquent au probl猫me du ch么mage des jeunes par le truchement du d茅veloppement agricole et rural, et stabilisent leurs institutions, ou bien ils auront une bombe politique sur les bras.

Le NEPAD affirme qu鈥檜ne bonne gouvernance politique est indispensable au d茅veloppement global de l鈥橝frique. L鈥檜n des moyens mis au point par le NEPAD pour am茅liorer la gouvernance est le M茅canisme africain d鈥櫭﹙aluation par les pairs. Est-ce il fonctionne comme il se doit?

Le M茅canisme est une initiative tr猫s originale, qui repose sur la participation volontaire des gouvernements qui d茅cident de soumettre leurs performances 脿 l鈥櫭﹙aluation de leurs pairs. La transparence est l鈥櫭﹍茅ment-cl茅 de la cr茅dibilit茅 d鈥檜n tel exercice auquel un nombre croissant de pays ont d茅cid茅 de se soumettre volontairement. D鈥檜n point de vue organisationnel, le M茅canisme dispose de son propre secr茅tariat diff茅rent de celui du NEPAD et est compos茅 d鈥檜n groupe de personnalit茅s ind茅pendantes. Le probl猫me est le suivant听: comment utiliser les conclusions et les recommandations de ces exercices d鈥櫭﹙aluation? Normalement ce sont les pays eux-m锚mes qui sont cens茅s mettre les recommandations en 艙uvre. Mais on sait qu鈥檌ls ont besoin d鈥櫭猼re aid茅s au niveau des moyens. C鈥檈st l脿 qu鈥檌l y a le gros probl猫me. Je pense qu鈥檌l faudra travailler les questions de d茅veloppement des capacit茅s et r茅unir les ressources et les partenaires n茅cessaires 脿 cette fin.

Est-il juste d鈥檃ffirmer au sujet des capacit茅s des pays 脿 mettre en 艙uvre les recommandations de l鈥櫭﹙aluation par les pairs qu鈥檌l ne s鈥檃git pas seulement des capacit茅s des gouvernements, mais aussi de celles de la soci茅t茅 civile, du pouvoir l茅gislatif, des m茅dias et ainsi de suite?

Tout 脿 fait. Vous pouvez disposer des meilleures institutions publiques, mais sans un solide esprit civique il y a de faibles chances de d茅veloppement d茅mocratique. Le r么le des organisations de la soci茅t茅 civile est capital dans ce sens.

D茅velopper l鈥檌nfrastructure physique de l鈥橝frique 鈥� routes, centrales 茅lectriques, ports, r茅seaux de communication, est l鈥檜ne des priorit茅s du NEPAD. Mais l鈥檌nfrastructure est une entreprise co没teuse. Comment la crise financi猫re mondiale actuelle a-t-elle influ茅 sur les projets du NEPAD d鈥檃ttirer plus de financement pour l鈥檌nfrastructure?

La crise financi猫re s鈥檈st transform茅e en une crise 茅conomique. Cela a eu des cons茅quences sur la le niveau des ressources allou茅es au continent africain. Compte tenu du fait que les projets d鈥檌nfrastructure n茅cessitent de gros budgets, cela pose probl猫me.

Pourtant, je crois aussi que c鈥檈st une excellente occasion pour apprendre 脿 mieux mobiliser nos ressources nationales. Certains pays ont connu des succ猫s dans ce domaine, d鈥檃utres pas vraiment. Je vais vous donner deux exemples chiffr茅s. La facture des importations alimentaires de l鈥橝frique s鈥櫭﹍猫ve 脿 40 milliards de dollars environ. Si on avait des politiques agricoles solides et si on investissait une partie seulement de cet argent dans ce secteur, on arriverait m锚me 脿 exporter des denr茅es alimentaires. La fuite des capitaux du continent est de l鈥檕rdre de 30 milliards de dollars. Sur ce montant, pr猫s de 20 milliards proviennent de la corruption. Il nous faudra examiner de plus pr猫s comment mobiliser les ressources dont nous disposons.

On entend souvent dire les repr茅sentants de la soci茅t茅 civile, des milieux universitaires et d鈥檃utres groupes que le NEPAD est un excellent 茅chafaudage intellectuel qui n鈥檈st pas bien suivi sur le terrain. Pourquoi ce programme est-il si lent 脿 se mettre en place?

Le NEPAD est un programme parfaitement adapt茅 aux probl猫mes de d茅veloppement du continent. C鈥檈st un programme exhaustif qui repose sur deux notions de valeur. La premi猫re est celle de l鈥檃ppartenance, qui nous encourage 脿 concevoir nous-m锚mes nos propres programmes de d茅veloppement. La deuxi猫me est celle de la promotion de l鈥檌nt茅gration 茅conomique comme moyen d鈥檃cc茅l茅rer le processus de d茅veloppement. Ces deux notions d茅finissent les priorit茅s sectorielles qu鈥檕n est en train de fixer. Nous avons travaill茅 茅troitement avec la Commission de l鈥橴nion africaine 脿 l鈥櫭﹖ablissement du CAADP. En science et technologie, nous avons 茅tabli des r茅seaux d鈥檈xcellence 脿 travers le continent. Dans nos d茅partements d鈥檌nformation et de technologie, nous avons lanc茅 des programmes en ligne, qui ont connu un grand succ猫s. Nous avons conseill茅 le d茅partement des affaires sociales de la Commission de l鈥橴nion africaine sur les questions li茅es aux politiques de sant茅. On a donc fait pas mal de choses

La p茅riode entre le lancement du NEPAD en 2001 et aujourd鈥檋ui a 茅t茅 exp茅rimentale. Et, comme dans toutes ces p茅riodes-l脿, il y a eu des hauts et des bas. On n鈥檃 certainement pas assez insist茅 sur nos succ猫s, et on a laiss茅 aux autres le soin de faire conna卯tre nos 茅checs. Mais 脿 partir de ce constat, t芒chons de cr茅er un nouveau NEPAD. Nous allons nous transformer en organe de planification et de coordination du NEPAD, qui aura pour principale mission d鈥檃cc茅l茅rer la mise en place des projets les plus importants qui d茅coulent des d茅cisions politiques prises par la Commission de l鈥橴nion africaine 脿 l鈥櫭ヽhelle du continent.

La communaut茅 internationale soutient le NEPAD depuis sa cr茅ation. Mais lorsque la d茅cision d鈥檌nt茅gration a 茅t茅 prise [de rapprocher le NEPAD des structures de l鈥橴nion africaine] il y a eu une p茅riode de flottement sur ce qui allait se passer, d鈥檜n point de vue structurel et op茅rationnel. Il 茅tait donc normal que la communaut茅 internationale se donne le temps de voir ce qui se passait. Il nous faut 脿 pr茅sent ranimer son engagement.听 L鈥檌nt茅gration est souhaitable pour deux raisons. La premi猫re est qu鈥檈lle permettra d鈥櫭﹍iminer les chevauchements constat茅es auparavant, et les contradictions. La seconde est qu鈥檈lle enverra un message positif 脿 la communaut茅 internationale sur la mani猫re de traiter avec chacun d鈥檈ntre nous, la Commission de l鈥橴nion africaine et le NEPAD.

Quant aux pays africains, il nous appartient de prouver au reste du monde ce dont on est capable. On doit expliquer notre mission, d茅tailler le plan de marche qu鈥檕n entend suivre et la mani猫re dont on travaille avec les communaut茅s 茅conomiques r茅gionales. Et le reste du monde verra ce qu鈥檕n est capable de faire. C鈥檈st un 茅norme d茅fi qui se pr茅sente 脿 nous. Il nous faudra le relever, prouver qu鈥檕n peut tenir nos engagements sur le terrain, car on sera jug茅 sur du concret.

Au d茅part, le NEPAD a 茅t茅 associ茅 avec plusieurs de ses plus illustres d茅fenseurs, qui ont travaill茅 茅troitement avec les pays donateurs du G-8. Mais certains de ces pr茅sidents ne sont plus au pouvoir. Avec l鈥檌nt茅gration plus 茅troite du NEPAD dans l鈥橴nion africaine, est-ce que vous pensez qu鈥檌l est temps de donner des responsabilit茅s politiques plus 茅tendues au NEPAD 脿 l鈥檌nt茅rieur de l鈥橝frique?

L鈥檌mpulsion donn茅e par ces chefs d鈥橢tat a 茅t茅 absolument n茅cessaire, sinon le NEPAD n鈥檃urait pas 茅t茅 appr茅ci茅 脿 sa juste valeur. Nous sommes sur le point de passer sous la tutelle d鈥檜ne copropri茅t茅 plus nombreuse, compos茅e des 53 pays de l鈥橴nion africaine. Cela veut dire qu鈥檌l faudra intensifier nos efforts de communication, qu鈥檌l faudra 锚tre pr茅sents dans plus d鈥檈ndroits et qu鈥檌l faudra tenir nos engagements partout d鈥檜ne mani猫re concr猫te.

Un processus parall猫le int茅ressant semble se dessiner parmi les partenaires internationaux de l鈥橝frique. Au d茅part le NEPAD a concentr茅 ses efforts sur ses relations avec le G-8. Mais d茅sormais c鈥檈st le G-20 qui sera le forum 茅conomique international le plus influent. C鈥檈st un groupe plus nombreux compos茅 de certaines 茅conomies 茅mergeantes comme la Chine, l鈥橧nde le Br茅sil et d鈥檃utres. Qu鈥檈st-ce que cela veut dire pour l鈥橝frique?

On peut pressentir ce qui va se passer sans vraiment en 锚tre s没r. En effet, le passage du G-8 au G-20 d茅coule du poids croissant des 茅conomies 茅mergeantes, ce qui a des cons茅quences directes sur les d茅cisions au niveau international. La constitution du G-20 constitue une adaptation structurelle positive aux nouvelles r茅alit茅s. C鈥檈st dans ce cadre que l鈥橝frique doit mener une r茅flexion mesur茅e et intelligente. Notre influence ne devrait pas diminuer dans ce nouveau processus. Et on devrait en appeler aux membres que nous comptons au sein du G-20 pour qu鈥檌ls expriment v茅ritablement les positions de l鈥橝frique.

Le NEPAD participe, avec l鈥橴nion africaine, aux r茅unions du G-20, pour s鈥檃ssurer que les messages transmis 脿 cette occasion correspondent aux objectifs du NEPAD. Ce que nous constatons du c么t茅 africain est que le continent s鈥檈xprime d鈥檜ne mani猫re plus coh茅rente et plus unie. Comme vous le savez, 脿 Copenhague [la conf茅rence internationale sur les changements climatiques], l鈥橝frique s鈥檈xprimera d鈥檜ne seule voix, il n鈥檡 aura qu鈥檜n seul coordinateur du Groupe africain et une seule strat茅gie de n茅gociations. A l鈥檃venir, l鈥橝frique se fera de plus en plus entendre par une seule voix.

鈥� Afrique Renouveau en ligne

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