La Commission Economique pour l'Afrique (CEA) a publié aujourd'hui une qui fournit une analyse préliminaire, d'un point de vue africain, des limites du droit commercial international en temps de crise comme aujourd'hui et propose de puissantes recommandations politiques à l'attention des décideurs africains.
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Après une brève analyse du droit du commerce international tel qu'il s'applique à la circulation des biens essentiels relatifs à la COVID-19, l'étude conclut que, dans des situations d'urgence réelle comme celle que nous connaissons actuellement, le rôle du droit dans la garantie de l'accès aux fournitures médicales essentielles sur le marché international est fortement réduit. L'impact a été grave, en particulier dans les pays qui ne disposent pas d'une capacité de production locale suffisante.
Dans un modèle économique mondial où l'Afrique exporte principalement des produits de base et importe principalement des produits finis, la crise a laissé l'Afrique confrontée à un double coup dur : (i) le blocage économique dans une grande partie du monde a fait chuter les prix des produits de base à des niveaux historiquement bas, provoquant ainsi une baisse importante et spectaculaire des recettes en devises dont la plupart des pays africains tributaires des ressources naturelles ont grand besoin ; et (ii) lorsque les pays avancés dotés de capacités de production et d'approvisionnement imposent des restrictions à l'exportation de fournitures médicales essentielles, il en résulte inévitablement une chute soudaine de l'offre, une hausse des prix et une augmentation tout aussi spectaculaire des factures d'importation pour les pays africains à un moment où leurs ressources déjà maigres sont mises à rude épreuve.
Compte tenu de la nature structurelle du défi, il n'y a pas grand-chose à faire à court terme. En conséquence, une grande partie de l'Afrique est une fois de plus obligée de compter fortement sur la charité des autres. Cette situation n'est pas viable. Quatre grandes leçons se dégagent de l'analyse.
L'industrialisation : il y a d'abord l'impératif d'industrialisation. Si les arguments économiques en faveur de l'industrialisation et de la diversification connexe en Afrique ont été trop longtemps convaincants, la COVID-19 en fait maintenant une question de survie pour le continent et ses citoyens.
Recherche et développement : vient ensuite la nécessité d'une infrastructure de connaissances composée d'une main-d'œuvre qualifiée pour maintenir un certain degré de capacité de recherche et de développement. L'Afrique ne peut réussir son effort d'industrialisation et de diversification que s'il est soutenu par une stratégie de R&D et une base de connaissances solides.
Un multilatéralisme efficace : non seulement l'industrialisation prend du temps, mais même une Afrique industrialisée dotée d'une base économique diversifiée devra placer le commerce avec le reste du monde au centre de sa stratégie de sécurité d'approvisionnement dans tous les secteurs, en permettant aux fabricants africains de faire partie de chaînes de valeur régionales et mondiales qui fonctionnent bien. À ce titre, l'Afrique doit continuer à plaider en faveur d'un multilatéralisme efficace dans le domaine du commerce, qui garantisse que les règles du jeu sont renforcées et appliquées par ses membres en toute bonne foi, dans l'intérêt collectif et avec un sens de la solidarité.
Réexamen de l'accord de libre-échange d'Afrique : enfin, en tirant les leçons des déficiences du système commercial mondial exposées par la réunion de la COVID-19 et en considérant que cette réunion a eu lieu alors que l'Afrique s'apprêtait à lancer la phase opérationnelle de l'accord de libre-échange d'Afrique, l'Afrique devrait saisir cette occasion pour réexaminer les dispositions de l'accord de libre-échange d'Afrique et élaborer des règles supplémentaires pour garantir la plus grande fluidité possible du commerce des produits essentiels dans des moments difficiles comme celui-ci.
Commentant la note de synthèse, David Luke, coordinateur du Centre de politique commerciale de la CEA pour l'Afrique, a déclaré : il est clair que le droit commercial ne peut garantir l'ouverture des marchés en temps de crise comme la pandémie mondiale actuelle. Il est possible pour le secrétariat de l'AfCFTA et les comités du commerce des biens et des services, lorsqu'ils seront en place, de réexaminer cette question et de trouver des solutions créatives.