Famine : l’Afrique peine à se mobiliser
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Famine : l’Afrique peine à se mobiliser
En juillet et août derniers, Jerry Rawlings, ancien président du Ghana devenu Haut-Représentant de l’Union africaine (UA) pour la Somalie, s’est rendu dans plusieurs capitales d'Afrique. Objectif : inviter les chefs d’État africains à une conférence panafricaine sur la famine dans la Corne de l’Afrique. « Je suis convaincu que les dirigeants africains relèveront le défi », a-t-il répété à chaque étape de son périple. Pourtant, seuls les présidents de quatre pays (Éthiopie, Guinée équatoriale, Djibouti et Somalie) se sont rendus à Addis-Abeba en Éthiopie, le 18 août.
Cette faible mobilisation n’a cependant pas sapé l’enthousiasme de Jerry Rawlings. Dans son discours d’ouverture, il a exhorté l’Afrique à prouver au reste du monde « que nous ne sommes pas incapables de prendre soin des nôtres ». Les Africains ont promis 50 millions de dollars d’aide. La Banque africaine de développement (BAD) a fait mieux avec 300 millions.
Plus de 12 millions de personnes vivent sous la menace d’une grave famine dans la Corne de l’Afrique (voir Afrique Renouveau en ligne). La Somalie et d’autres pays de la région ont besoin d’au moins 2,5 milliards de dollars pour éviter de nouveaux décès, d’après le Programme alimentaire mondial. En août, avant la conférence des donateurs organisée par l’UA, seuls 45% de ce montant avaient été versés. Grâce aux 350 millions de dollars annoncés lors de la réunion et à d’autres contributions, les promesses de dons ont atteint 63 % de ce montant fin septembre, d’après l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO).
Jacques Diouf, le Directeur général de la FAO, a estimé en septembre que la réponse de la communauté internationale à la famine avait été « tardive et inadaptée ». Il a cependant jugé positive une réunion tenue mi-septembre entre les gouvernements de la Corne de l’Afrique et des représentants de la BAD et de la Banque mondiale. Au cours de cette réunion, les deux banques ont promis d’affecter 500 millions de dollars supplémentaires au développement à long terme de la région.
Il a de même été reproché aux dirigeants africains de ne pas avoir réagi assez vite face à la crise. La conférence des donateurs d’Addis-Abeba a été reportée une première fois pour donner le temps aux pays de rassembler des fonds. Divers observateurs estiment que les 50 millions de dollars promis par les gouvernements africains sont insuffisants et que la majorité sera versée sous la forme d’une aide « en nature », alors qu’une aide financière serait plus souple. En outre, la manière dont les gouvernements fourniront cette assistance n’a pas été précisée.
« Décevant »
Nicanor Sabula, membre d’Africans Act 4 Africa, une coalition d’organisations de la société civile, estime que le niveau de participation à la conférence des donateurs a été « décevant et embarrassant ». Cette réaction contribue « à renforcer l’image d’une Union africaine qui ne serait qu’un club pour présidents », ajoute-t-il.
Mais c’est oublier que des pays africains, (le Kenya notamment) accueillent de nombreux réfugiés auxquels ils apportent de facto une aide précieuse. Le Premier ministre kényan Raila Odinga a annoncé en juillet que son gouvernement avait dépensé, jusqu’alors, 110 millions de dollars pour fournir des vivres à plus d’un million de réfugiés se trouvant sur son territoire.
De son côté, Jerry Rawlings rencontre actuellement des responsables du secteur privé pour les inciter à contribuer aux efforts d’aide. Si lesÌý payss africains ont promis 50 millions de dollars lors de la réunion d’Addis-Abeba, les Kényans ordinaires, avec l’aide d’entreprises privées, ont réussi à rassembler plus de 60 millions de dollars en moins de trois mois. Kanayo Nwanze, président du Fonds international de développement agricole des Nations Unies, estime que « l’Afrique ne doit pas attendre que la communauté internationale règle ses problèmes ».