Au moment où le monde entier célèbre la Journée internationale de la femme, le 8 mars, les discussions mondiales tournent constamment autour des thèmes cruciaux de l'égalité des sexes et de l'autonomisation des femmes. En Sierra Leone, la première dame, Fatima Maada Bio, est à l'avant-garde de la lutte contre la violence sexiste dans son pays. Dans un franc entretien avec Jocelyne Sambira pour Afrique Renouveau, elle nous donne un aperçu de ses efforts et de ses initiatives. Voici quelques extraits de cette conversation :
De nombreuses femmes et jeunes filles se taisent ... parce qu'elles pensent que personne d'autre n'entendra leur voix.
Percevez-vous un changement d'attitude à l'égard de l'égalité entre les hommes et les femmes ?
Plus de gens nous écoutent maintenant, et plus d'hommes commencent à comprendre notre situation. En Sierra Leone, notre état d'esprit est passé de l'acceptation du statu quo à la déclaration suivante : "Non, nous interdisons que cela continue dans notre pays." De nombreuses femmes qui ont travaillé dans ce domaine sont désormais convaincues que nous pouvons mettre fin à la violence à l'égard des femmes et des jeunes filles et à toutes les formes d'abus dont elles sont victimes.
Quelles leçons pouvez-vous partager avec d'autres pays ? Par exemple, comment pouvons-nous protéger les femmes pendant les conflits ?
Avant tout, il faut parler ! Le silence n'a jamais résolu nos problèmes. Votre dignité a déjà été violée, elle vous a été enlevée. Dites-vous et dites aux autres : "Je veux que les gens sachent". Je suis fermement convaincue que le fait d'utiliser votre voix trouve un écho auprès d'autres victimes, et que cela permet de construire progressivement une communauté de force.Ainsi, pour tous ceux qui œuvrent en faveur de l'égalité des sexes et de la lutte contre la violence à l'égard des femmes, je vous invite à utiliser votre voix et à crier aussi fort que vous le pouvez.
Certaines femmes qui s'expriment se heurtent à des réactions négatives. Comment y faire face ?
Lorsque vous combattez le mal, vous devez vous attendre à ce que le mal riposte. Personnellement, je me prépare en ignorant tout ce qui se dit sur moi. Ce combat est bien plus important que cela ; il concerne de nombreuses personnes, dont moi. Ceux qui s'en prennent aux femmes veulent généralement les réduire au silence parce qu'ils craignent que les femmes aient leur mot à dire à la table des décisions.
Dans le monde d'aujourd'hui, il faut oser rêver et avoir un but. Quelles que soient les circonstances, si vous avez un rêve, vous avez un but. Concentrez-vous sur votre rêve et protégez-le de ceux qui tentent de l'éteindre, car votre vie tourne autour de ce rêve.
Vous avez plaidé vigoureusement en faveur de la poursuite des auteurs de viols en Sierra Leone. Est-ce un succès ?
Oui, la Sierra Leone est aujourd'hui un pays modèle en Afrique. Notre Président croit qu'il faut donner aux femmes la possibilité de s'épanouir et de participer à l'édification de la nation. Grâce à son soutien, nous disposons désormais d'un tribunal spécialisé dans les délits sexuels qui traite exclusivement les affaires de viol. Les délinquants sont désormais passibles d'une peine minimale de 15 ans et d'une peine maximale d'emprisonnement à perpétuité. Cette législation a dissuadé les violeurs potentiels.
Notre campagne dépasse les villes et s'étend à tous les coins de la Sierra Leone. Nous avons obtenu le soutien de chefs religieux, de chefs suprêmes, de professionnels de la santé, d'enseignants et de bien d'autres personnes.
Quels autres résultats avez-vous obtenus à ce jour ?
Au cours des cinq dernières années, nous avons atteint un taux de rétention scolaire de 69 % pour les filles. C'est un chiffre sans précédent. Les filles excellent désormais dans les examens publics. Près de 800 000 jeunes sont scolarisés dans le pays, et davantage de filles restent à l'école tout au long de l'année.
L'année dernière, l'Organisation mondiale de la santé a signalé une baisse de 60 % de la mortalité infantile et juvénile en Sierra Leone depuis 1990.
Partagez-vous vos expériences avec d'autres premières dames africaines ?
Oui, nous avons le club des premières dames africaines, connu sous le nom d'OAFLA (Organisation des premières dames africaines). Au cours des deux dernières années, nous avons collectivement décidé de nous concentrer sur les questions de genre.
J'ai lancé la campagne "Hands Off Our Girls", qui vise à protéger les filles du viol et du mariage précoce.
- Cet article a été publié pour la première fois en novembre 2023