25 ans d’Afrique Renouveau : en phase avec la dynamique de tout un continent
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25 ans d’Afrique Renouveau : en phase avec la dynamique de tout un continent
Deux bulletins des débuts d’Africa Emergency, gardés précieusement dans les bureaux onusiens d’Afrique Renouveau à New York, donnent un aperçu du continent africain en 1985. C'était avant Internet, quand de nombreuses salles de rédaction bruissaient encore du cliquettement des clefs des machines à écrire. Le bulletin faisait 16 pages et était intégralement imprimé en noir et blanc, sauf pour le mot Urgence, écritÌýen vert à la une.Ìý
Avance rapide : nous sommes maintenant en 2012. Le magazine Afrique Renouveau est publié en anglais et en français, et distribué à quelque 40Ìý000 exemplaires à travers le monde, en couleurs sur papier semi-brillant. Le site Web —Ìý   — attire en moyenne près de 60Ìý000 visiteurs par mois. Quelque 20Ìý000 personnes suivent les pages Facebook et Twitter du magazine.
La lecture de la première édition de l'ancien bulletin et prédécesseur d’Afrique Renouveau, paru en avril 1985, laisse un sentiment plutôt sombre. Deux photos de première page y font figurer 15 personnes au total, arborant toutes un air grave : parmi elles se trouve feu le président tanzanien Julius Nyerere, dont le bulletin offre un entretien exclusif. Les articles ont pour principaux sujets la sécheresse et la famine. L'Afrique traversait une grave crise humanitaire et le bulletin faisait partie intégrante de l'opération internationale d’aide humanitaire.
Les Nations Unies avaient mis en place le Bureau des opérations d’urgence en Afrique (Office of Emergency Operations in Africa, OEOA) afin de coordonner les efforts humanitaires après la sécheresse qui avait touché l'Ä–thiopie pour s'étendre ensuite à vingt pays africains. Bulletin de l'OEOA était de traiter de problèmes complexes dans une langue accessibleÌýà tous.Ìý
De l©urgence à la relanceÌý
L'évolution du magazine reflète la trajectoire du continent. Alors que la sécheresse reculait et qu'il apparaissait de plus en plus clairement que le vrai défi était la promotion, sur le long terme, du développement économique et social du continent — sa «ÌýrelanceÌý» — les Nations Unies décidèrent de fermer l'OEOA et l'Assemblée générale se réunit en session extraordinaire pour débattre du développement de l’Afrique.
Mais Africa Emergency avait développé des liens positifs avec les médias, les gouvernements, les organisations gouvernementales ou autres, et nombreux étaient ceux qui pensaient qu'une publication du même type serait utile. C'est ainsi qu'Afrique Relance fut lancée en 1987.
Dans le premier numéro d’avril 1987, l'éditorial explique la nouvelle formule du magazine : «ÌýIl est clair que l’urgence n'est plus le sujet d’inquiétude prioritaire du continentÌý», écrivait Salim Lone qui y demeura pour devenir rédacteur en chef. «ÌýIl faut désormais se concentrer sur la relance et les efforts de développement du continentÌý».
Une stratégie deÌýconquête du lectorat
Avec le temps, Afrique Relance commença à ressembler à un magazine plutôt qu'à un bulletin, par le nombre de pages supplémentaires, les articles de fond consacrés aux grandes questions d’actualité, et d’autres traitant d’une grande variété de sujets. Au départ, les articles abordaient essentiellement les questions économiques, sociales et humanitaires. L’ONU étant composée d’Ėtats Membres et le magazine étant l'une de ses publications, il était difficile pour celui-ci de traiter de questions politiques «ÌýsensiblesÌý» comme les coups d’Etat ou les violations des droits de l'homme. «ÌýOn jugeait plus acceptable
alors de traiter d’autres sujets que ceux-là Ìý», explique Ernest Harsch, entré au magazine en 1989 pour devenir chef d’édition en 2001. Le magazine n'avait pas non plus les moyens de concurrencer les médias traditionnels en cherchant les scoops.
L'intérêt d’Afrique Relance n'était pas non plus, selon Ernest Harsch, de traiter les informations «ÌýracoleusesÌý» que recherchaient tous les grands médias, pour lesquels les famines, les catastrophes, les guerres et autres sujets à sensation avaient tendance à être la règle. Dès qu'il s'agissait de l'Afrique, ces organes évoquaient surtout le continent dans ses aspects négatifs, en gommant une réalité beaucoup plus complexe. Le magazine préférait donc se concentrer sur les défis du continent et les efforts bien réels consentis par les Africains et leurs partenaires pour améliorer la vie quotidienne de la population.
La réussite d’un magazine fut de susciter l'intérêt d’un large public au sein des élites du continent — en particulier dansÌýles médias, auprès des décideurs des gouvernements, chez les universitaires ou parmi les militants de la société civile. C'était «Ìýun vrai bol d’airÌý», se souvient Ernest Harsch, «Ìýet cela a bien marchéÌý». Au cours des années 1990, les pays africains ont commencé à se démocratiser et les sujets politiques sont alors devenus plus faciles à couvrir.Ìý
En 2004, le magazine changea de nom pour prendre celui d’Afrique Renouveau. Dans un message à l’intention des lecteurs, l'ancien Secrétaire général adjoint à la communication et à l'information, Shashi Tharoor, et le Conseiller spécial du Secrétaire général pour l'Afrique, Ibrahim Gambari, justifiaient ainsi ce changement : «ÌýLa plupart des pays africains ont aujourd’hui des gouvernements démocratiquement élus... Les dirigeants africains ont aussi conçu un plan visionnaire, le Nouveau partenariat pour le développement de l'Afrique (NEPAD)Ìý».Ìý
Ils poursuivaient dans ces termes : «ÌýEn changeant de nom et en prenant celui d’Afrique Renouveau, le magazine cherche à s'identifier plus nettement à cette dynamique nouvelle d’initiative et de renaissanceÌý».
Le magazine continua à étendre sa couverture du programme de développement de l'Afrique en mettant en relief les travaux de la Commission économique des Nations Unies pour l'Afrique, du NEPAD et du Bureau du Conseiller spécial pour l'Afrique de l’ONU, entre autres. Lorsque le NEPAD a fêté son dixième anniversaire en 2011, Afrique Renouveau a créé une page Web spécialement consacrée à l'événement. Le magazine a aussi publié des numéros spéciaux sur les enfants, le VIH/sida et les femmes, ainsi que des brochures, des dépliants et d’autres
documents d’information.Ìý
Une nécessaireÌýmodernisation
Internet et les technologies mobiles de la communication multiplient aujourd’hui les sources d’information disponibles pour les lecteurs. Comme le note Margaret Novicki, Chef du Service des campagnes de communication de la Division de la communication stratégique au Département de l’information, ces changements «Ìýobligent Afrique Renouveau à nager dans le sens du courantÌý».Ìý
Parvati Heather McPheeters a créé la première version du site Web du magazine début 1997. A l'époque, explique-t-elle, «Ìýle but était de donner accès au magazine à quelques lecteurs de plus, qui se comptaient par dizaines plutôt que par milliersÌý». Le site actuel impressionne Parvati McPheeters, qui a quitté le magazine en 2006. «ÌýC'est très satisfaisant d’avoir été à l'origine de la mise en place de l'infrastructure,Ìý» nous a-t-elle confié.Ìý
Le rédacteur en chef actuel, Masimba Tafirenyika, a rejoint l'équipe éditoriale en 2009 et s'est mobilisé pour que le magazine «Ìýne soit pas en reste dans un monde en mutationÌý». Car selon Masimba Tafirenyika, «Ìýquand notre publication était en noir et blanc, nous étions à la traîne : il fallait changer le style, la mise en page et les contenus. Le magazine doit attirer l'attentionÌý». Les coûts liés à l'impression couleur étaient jadis prohibitifs, mais les progrès technologiques permettent aujourd’hui de publier un magazine en couleur à des prix qui ne sont pas si différents de ceux des publications noir et blanc.
L'un des premiers objectifs de Masimba Tafirenyika a été d’élargir le lectorat du magazine. «ÌýL'important est d’être lu par les jeunes, les femmes ou la société civileÌý». Pour y parvenir, «Ìýnotre style doit être moins abstrait et plus accessible. La mise en page doit donner envie de lire le contenu et le choix des sujets doit être dynamique et conforme aux changements qui s'opèrent au sein de la sociétéÌý».Ìý
Les rédacteurs, les chefs d’édition et leurs collègues ont tous applaudi lorsque les premières pages en couleur ont été imprimées sur papier glacé en août 2010. «ÌýC'était une étape importante pour le magazine et j'étais très fière de l'équipe», se souvient Margaret Novicki.
Les technologies de l'information et de la communication changent rapidement et le magazine est désormais prêt à suivre le mouvement. «ÌýAvec l'évolution des connexions à Internet et de l'accès mobile, nous aimerions, spécialement en Afrique, offrir nos produits dans divers formats et pour différentes plateformes, y compris pour les tablettesÌý», affirme Masimba Tafirenyika.
Les relations qu'entretient le magazine en Afrique avec plus de 250 publications en ligne et imprimées, en anglais aussi bien qu’en français, permettent aussi aux articles d’Afrique Renouveau d’être reproduits pour toucher un lectorat étendu et diversifié.Ìý
Eloges
Des évaluations indépendantes conduites en 1991 et en 1994 ont permis de conclure à un fort taux de satisfaction des lecteurs, au-dessus des 70Ìý%. Selon une enquête réalisée l'année dernière auprès des lecteurs d’Afrique Renouveau, 91Ìý% des personnes interrogées affirment mieux comprendre les problèmes prioritaires de l'Afrique après avoir visité le site du magazine.
Dans son numéro d’août-septembre 2011, Udvikling, une respectable publication danoise consacrée au développement, a classé Afrique Renouveau parmi les huit premiers «Ìýmagazines étrangers de très haute qualitéÌý» offrant «Ìýune vision et une perspective uniques sur le développement dans le mondeÌý». Afrique Renouveau était ainsi cité aux côtés de The Economist de Londres et des magazines américains Foreign Affairs et National Geographic. En évoquant le magazine, Udvikling affirme que «Ìýpeu de publications dans le monde sont à la hauteur des moyens mis en oeuvre par cette publication trimestrielle pour couvrir l'Afrique sous plusieurs anglesÌý».
Alors qu'Afrique Renouveau fêteÌýses 25 ans, Margaret NovickiÌýadresse cependant une mise enÌýgarde : «Ìýmême si le magazine aÌýdéjà fait beaucoup, le travail à Ìýaccomplir reste important : nous ne pouvons pas nous permettreÌýde nous reposer sur nos lauriersÌý».
Pour Masimba Tafirenyika et son équipe, il n'y a qu'un chemin à suivre : aller de l'avant.