Alors que nous cherchons les moyens de r¨¦duire le nombre de nouvelles victimes de mines terrestres, nous devons nous rappeler les progr¨¨s remarquables qui ont ¨¦t¨¦ r¨¦alis¨¦s en 1989 pendant les op¨¦rations de d¨¦minage men¨¦es dans le cadre du programme d'action contre les mines en Afghanistan. Notre d¨¦termination ¨¤ vivre dans un monde lib¨¦r¨¦ de la menace des mines terrestres et des restes explosifs de guerre est renforc¨¦e par le souvenir des personnes qui sont mortes ou qui ont ¨¦t¨¦ bless¨¦es. J'ai l'espoir qu'il me sera donn¨¦ de voir durant ma vie un monde o¨´ il n'y aura plus victimes de mines terrestres.
Les activit¨¦s de d¨¦minage contribuent consid¨¦rablement ¨¤ la paix dans les situations de post-conflit. Le Service de la lutte antimines des Nations Unies (UNMAS) a ¨¦t¨¦ cr¨¦¨¦ en 1997 comme centre de liaison des actions li¨¦es aux mines par la fusion du Groupe de d¨¦minage du D¨¦partement des op¨¦rations de maintien de la paix des Nations Unies (DOMP) et du Groupe d'orientation du d¨¦minage (MCPU) du D¨¦partement des affaires humanitaires (DHA). L'UNMAS fait aujourd'hui partie du Bureau de l'¨¦tat de droit et des institutions charg¨¦es de la s¨¦curit¨¦ du DOMP. L'ann¨¦e derni¨¨re, plus de 200 000 mines terrestres ont ¨¦t¨¦ enlev¨¦es dans le monde. En Afghanistan seulement, plus de 82 000 mines antipersonnel ont ¨¦t¨¦ d¨¦truites en 2008 par plus de 8 000 personnels nationaux. En m¨ºme temps, au Soudan, les efforts collectifs ont permis de d¨¦miner plus de 28 000 kilom¨¨tres de routes, ce qui a facilit¨¦ la circulation et la r¨¦appropriation des terres arables, et relanc¨¦ l'activit¨¦ commerciale.
Toutefois, des d¨¦fis importants persistent : chaque jour, les mines terrestres tuent et blessent, entravent le d¨¦veloppement social et ¨¦conomique et repr¨¦sentent un obstacle s¨¦rieux ¨¤ la distribution de l'aide humanitaire dans les zones probl¨¦matiques du monde. L'UNMAS poursuivra ses activit¨¦s avec z¨¨le et d¨¦termination jusqu'¨¤ ce que nous mettions fin ¨¤ nos op¨¦rations. En attendant, l'¨¦quipe de d¨¦minage continuera ses activit¨¦s sur de nouveaux terrains, s'adaptera aux nouvelles id¨¦es et restera vigilante face ¨¤ l'¨¦volution rapide des nouvelles m¨¦thodes de guerre.
Pour atteindre ? z¨¦ro victime ?, il faut cibler deux domaines essentiels : les communaut¨¦s locales et les gouvernements nationaux. La prise en main des op¨¦rations de d¨¦minage par les gouvernements et l'efficacit¨¦ des partenariats mis en place avec les bailleurs de fonds, les organisations non gouvernementales (ONG), les organisations humanitaires et les communaut¨¦s locales est essentielle. L'ONU joue un r?le catalyseur imm¨¦diat dans la coordination de la lutte mondiale antimines. Je suis convaincu que les op¨¦rations de d¨¦minage, en particulier celles qui sont g¨¦r¨¦es et dirig¨¦es au niveau national, renforcent la confiance parmi la population et dans le gouvernement dans le cadre des op¨¦rations de maintien de la paix et encouragent la cr¨¦ation de nouveaux programmes pour assurer la reconstruction des ?tats apr¨¨s un conflit.
Prise en main au niveau national
Il incombe finalement aux autorit¨¦s gouvernementales de mener les op¨¦rations de d¨¦minage. Celles-ci doivent donc ¨ºtre int¨¦gr¨¦es le plus t?t possible dans les programmes de reconstruction et de d¨¦veloppement du pays. Dans les pays dont les terrains sont truff¨¦s de restes explosifs de guerre, l'enl¨¨vement des mines est une condition pr¨¦alable ¨¤ la reconstruction et au d¨¦veloppement apr¨¨s un conflit. C'est pourquoi un ¨¦l¨¦ment essentiel de notre travail consiste ¨¤ faciliter la prise en main par les pays eux-m¨ºmes des op¨¦rations men¨¦es par l'ONU.
Cette t?che est un d¨¦fi constant, c'est pourquoi elle constitue un ¨¦l¨¦ment clef de la Strat¨¦gie interinstitutions des Nations Unies contre les mines pour 2006-2010. Apr¨¨s les r¨¦ussites enregistr¨¦es en Croatie et en Afghanistan, l'UNMAS entame actuellement sa phase de transition au Soudan.
Importance des partenariats
Les Centres de coordination des activit¨¦s de d¨¦minage sont souvent directement dirig¨¦s par les autorit¨¦s locales. Le r?le de l'ONU est de fournir l'assistance n¨¦cessaire au niveau local et de soutenir la coop¨¦ration internationale. Le renforcement de la capacit¨¦ locale garantira l'efficacit¨¦ ¨¤ long terme des op¨¦rations au niveau national. Dans des pays comme l'Afghanistan, la R¨¦publique d¨¦mocratique du Congo et le Soudan, les ONG locales ont prouv¨¦ qu'elles jouaient un r?le essentiel dans les activit¨¦s de d¨¦minage. L'ONU ne pourrait pas atteindre ses objectifs ambitieux sans la coop¨¦ration de l'ensemble de la communaut¨¦ internationale. Apr¨¨s tout, ce sont la soci¨¦t¨¦ civile et les pays engag¨¦s comme le Canada et la Norv¨¨ge qui ont ouvert la voie ¨¤ la Convention d'Ottawa. Les organisations non gouvernementales et les pays touch¨¦s par les mines font la plus grande partie du travail et continuent d'assumer la plus grande part de responsabilit¨¦s pour r¨¦aliser l'objectif ultime, un monde lib¨¦r¨¦ des mines. Si nous avons une id¨¦e du monde tel qu'il devrait ¨ºtre et avons ¨¦tabli un plan pour y parvenir, tous ces acteurs sont essentiels ¨¤ sa r¨¦alisation. Les partenariats mis en place au niveau national cr¨¦ent ¨¦galement une base solide ¨¤ la coordination de la r¨¦ponse mondiale ¨¤ la lutte antimines.
Coordination des nations unies
Au cours des 12 derni¨¨res ann¨¦es, l'UNMAS a assur¨¦ une coordination sans pr¨¦c¨¦dent par le biais du Groupe interinstitutions de coordination de la lutte antimines (IACG-MA). En 1998, l'Assembl¨¦e g¨¦n¨¦rale a accueilli favorablement la cr¨¦ation de l'UNMAS, consciente de son r?le en tant qu'¨¦l¨¦ment central de la lutte antimines au sein du syst¨¨me des Nations Unies, ainsi que ? sa collaboration avec les organismes, fonds et programmes des Nations Unies et son action de coordination touchant toutes les activit¨¦s concernant les mines men¨¦es par ces derniers?.1 Ce soutien a ¨¦t¨¦ r¨¦it¨¦r¨¦ dans les r¨¦solutions suivantes. Parmi les t?ches qui lui incombent en tant que centre de liaison, l'UNMAS a coordonn¨¦ l'¨¦laboration du document intitul¨¦ Lutte antimines et coordination efficace : la politique interinstitutions des Nations Unies, qui ¨¦tait destin¨¦ ¨¤ fournir une orientation et ¨¤ r¨¦partir les responsabilit¨¦s entre les 14 d¨¦partements, organismes, fonds et programmes de l'ONU engag¨¦s dans ce domaine. Il d¨¦finit cinq piliers de la lutte antimines : mobilisation, ¨¦ducation sur les risques li¨¦s aux mines, destruction des stocks, assistance aux victimes et enl¨¨vement des mines. Il a ¨¦t¨¦ remis ¨¤ jour en 2005. L'UNMAS a aussi coordonn¨¦ le d¨¦veloppement de deux strat¨¦gies de cinq ans couvrant les p¨¦riodes 2001-2005 et 2006-2010.
Depuis le premier Programme de lutte antimines en Afghanistan en 1989, les Nations Unies ont men¨¦ des op¨¦rations humanitaires de d¨¦minage dans de nombreux pays. Au d¨¦but des ann¨¦es 1990, les activit¨¦s de d¨¦minage ont fait partie int¨¦grante des op¨¦rations de maintien de la paix de l'ONU en Angola, en Bosnie, au Cambodge et au Mozambique. Au milieu des ann¨¦es 1990, face ¨¤ la menace que posaient les mines au niveau mondial, une coalition de groupes de la soci¨¦t¨¦ civile a cr¨¦¨¦ la Campagne internationale pour interdire les mines terrestres qui a d¨¦bouch¨¦ sur l'adoption en 1997 de la Convention d'Ottawa, la remise du prix Nobel ¨¤ la Campagne et une transformation du paysage du d¨¦minage humanitaire dans lequel se d¨¦roulent les activit¨¦s de l'UNMAS. Alors que le 1er mars 2009 marquait le douzi¨¨me anniversaire du Trait¨¦ d'interdiction des mines antipersonnel, des efforts de mobilisation cibl¨¦s sont n¨¦cessaires pour poursuivre sa mise en ?uvre.
En plus des probl¨¨mes li¨¦s aux mines antipersonnel, l'UNMAS examine les risques pos¨¦s par les mines antiv¨¦hicule, d'autres restes explosifs de guerre et r¨¦pond aux besoins des survivants qui n¨¦cessitent une aide bien apr¨¨s la fin des op¨¦rations de d¨¦minage. Depuis 2002, l'UNMAS accro¨ªt la pression sur les parties pour qu'elles adoptent des instruments juridiquement contraignants sur ces questions : le Protocole V de la Convention sur certaines armes classiques (CCW), le premier instrument n¨¦goci¨¦ au niveau multilat¨¦ral pour traiter des engins non explos¨¦s et abandonn¨¦s, est entr¨¦ en vigueur en 2006. Plus r¨¦cemment, 98 ?tats ont sign¨¦ la nouvelle Convention sur les armes ¨¤ sous-munitions (CASM) qui a ¨¦t¨¦ ouverte ¨¤ la signature, ¨¤ Oslo, le 3 d¨¦cembre 2008, et 10 d'entre eux l'ont ratifi¨¦e. La Convention interdit l'utilisation, le stockage, la production et le transfert d'armes ¨¤ sous-munitions et aborde d'autres questions comme l'aide aux victimes, le nettoyage des zones contamin¨¦es et la destruction des stocks. En tant que centre de liaison du DOMP pour le Groupe d'appui interinstitutions ¨¤ la Convention relative aux droits des personnes handicap¨¦es, l'UNMAS a suivi de pr¨¨s l'entr¨¦e en vigueur de la Convention le 3 mai 2008 et commence ¨¤ l'int¨¦grer dans ses travaux au si¨¨ge de l'ONU et sur le terrain.
Ces nouveaux instruments renforceront le cadre l¨¦gal dans lequel se d¨¦roulent les activit¨¦s de l'UNMAS.
Au cours des derni¨¨res ann¨¦es, le nombre d'op¨¦rations men¨¦es par le DOMP et le D¨¦partement des affaires politiques (DAP) qui comportaient des ¨¦l¨¦ments d'action de d¨¦minage comme t?ches sp¨¦cifi¨¦es ou implicites dans le cadre du mandat a augment¨¦ de mani¨¨re significative. L'UNMAS apporte actuellement un appui et une assistance directs ¨¤ dix missions de maintien de la paix et un soutien technique ¨¤ quatre autres. Dans ces op¨¦rations, le Service est charg¨¦ de toutes les activit¨¦s de d¨¦minage, y compris l'aide pour r¨¦duire les conflits des pays sortant d'un long conflit, comme l'Afghanistan, le Soudan et le Sahara occidental; la mise en ?uvre des programmes d'aide aux victimes, comme au Soudan; la destruction des stocks et des caches de munitions, comme en Afghanistan et au Congo; le d¨¦minage des routes et des infrastructures de base, comme au Tchad, au Liban et au Sahara occidental; et la destruction des restes explosifs de guerre comme ¨¦l¨¦ment essentiel ¨¤ un r¨¨glement de la paix, comme au N¨¦pal. Ces exemples soulignent l'¨¦tendue des activit¨¦s et le nombre d'acteurs engag¨¦s dans les op¨¦rations de d¨¦minage et mettent en valeur le fait que la coordination est une condition indispensable ¨¤ la mise en ?uvre efficace de ces op¨¦rations au niveau local.
La voie ¨¤ suivre
Alors que la lutte antimines se poursuit, des opportunit¨¦s se pr¨¦sentent pour am¨¦liorer le r?le de l'UNMAS et de ses partenaires dans le soutien aux programmes existants, ainsi que dans les nouvelles questions auxquelles font face les acteurs de la lutte antimines. L'UNMAS continuera d'affiner ses strat¨¦gies et ses programmes afin de maximiser l'impact de ses activit¨¦s. Donner aux pays la ma¨ªtrise des op¨¦rations de d¨¦minage am¨¦liorera son int¨¦gration au sein et au-del¨¤ du D¨¦partement des op¨¦rations de maintien de la paix et facilitera le d¨¦veloppement d'une politique coh¨¦rente entre les organisations. Chacun de ces ¨¦l¨¦ments jouera un r?le d¨¦terminant dans l'affirmation de notre vision d'un monde o¨´ les individus et les communaut¨¦s vivent dans un environnement sans risque et propice au d¨¦veloppement, o¨´ les victimes sont prises en charge et les survivants sont pleinement int¨¦gr¨¦s dans la soci¨¦t¨¦.
Je travaille dans un domaine qui ne fait pas tr¨¨s souvent la une de l'actualit¨¦. L'enl¨¨vement des mines terrestres et des restes explosifs de guerre est toutefois une t?che qui est essentielle ¨¤ la vie de millions de personnes dans le monde qui d¨¦pendent de nous pour amener leurs enfants ¨¤ l'¨¦cole en toute s¨¦curit¨¦ ¨¤ Kaboul, en Afghanistan, ou pour transporter leurs produits au march¨¦ sur des routes d¨¦min¨¦es, ¨¤ El Fasher, au Soudan.
Les ¨¦v¨¦nements des deux derni¨¨res d¨¦cennies n'ont pas ¨¦t¨¦ r¨¦solus, mais ont mieux d¨¦fini les d¨¦fis que posent les op¨¦rations de d¨¦minage. Ces d¨¦fis mondiaux affectent des millions de personnes dans pr¨¨s de 80 pays qui vivent dans la peur quotidienne de marcher sur une mine terrestre et des restes explosifs de guerre. Alors que les acteurs engag¨¦s dans la lutte antimines s'adaptent aux d¨¦fis continus pos¨¦s par ces munitions, l'UNMAS r¨¦pondra avec la rapidit¨¦ voulue. La participation et le soutien actifs des autorit¨¦s nationales et des ONG locales et internationales sont les seuls moyens d'atteindre l'objectif z¨¦ro victime de mines terrestres. Un tel d¨¦fi n¨¦cessite une action mondiale, consentie et coordonn¨¦e par le biais de l'institution la plus universelle, les Nations Unies.
Note 1. A/Res/62 (1999)
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