11 juin 2012

L'id¨¦e de proclamer chaque ann¨¦e une journ¨¦e reconnaissant la situation des veuves dans le monde s'est concr¨¦tis¨¦e avec l'Assembl¨¦e g¨¦n¨¦rale des Nations Unies d¨¦clarant le 23 juin Journ¨¦e internationale des veuves. Dans un message adress¨¦ l'ann¨¦e derni¨¨re, le Secr¨¦taire g¨¦n¨¦ral des Nations Unies Ban Ki-moon a soulign¨¦ que ? cette Journ¨¦e internationale des veuves offre l'occasion d'attirer l'attention sur les nombreuses difficult¨¦s que connaissent les femmes lorsque leur mari meurt. Plong¨¦es dans le chagrin, les veuves se retrouvent parfois sans filet de protection sociale pour la premi¨¨re fois depuis leur mariage. Trop souvent, elles sont priv¨¦es du droit d'h¨¦riter, de droits fonciers, de l'acc¨¨s ¨¤ l'emploi et m¨ºme des moyens d'assurer leur survie. Dans les r¨¦gions o¨´ le statut social d'une femme d¨¦pend de celui de son mari, les veuves peuvent, du jour au lendemain, ¨ºtre frapp¨¦es d'ostracisme et d'isolement. Qu'il soit d¨¦sir¨¦ ou non, le mariage peut alors ¨ºtre pour une veuve le seul moyen de retrouver une place dans la soci¨¦t¨¦. Il y a environ 245 millions de veuves dans le monde, dont plus de 115 millions vivent dans une extr¨ºme pauvret¨¦. Dans les pays touch¨¦s par un conflit, les femmes deviennent souvent veuves lorsqu'elles sont encore tr¨¨s jeunes et ont alors pour lourde charge de prendre soin de leurs enfants sans aide ni soutien, au milieu des combats, parfois jet¨¦es sur les routes. Certaines de ces veuves sont encore des adolescentes, certaines sont plus jeunes encore. La mort de leur mari peut avoir de terribles cons¨¦quences que ces femmes devront supporter pendant le reste de leur vie. ?

L'¨¦mouvant message du Secr¨¦taire g¨¦n¨¦ral rappelle une histoire. L'histoire d'une fille mari¨¦e ¨¤ un tr¨¨s jeune ?ge et brutalis¨¦e.

Mari¨¦e ¨¤ 12 ans, elle ¨¦tait veuve ¨¤ 16 ans et ¨¤ 18 ans, travaillait dans l'industrie du sexe. Ses malheurs ont d¨¦but¨¦ peu apr¨¨s la mort de son mari. Elle s'¨¦tait r¨¦sign¨¦e ¨¤ vivre dans l'anonymat jusqu'¨¤ ce que son beau-fr¨¨re, le fr¨¨re a¨ªn¨¦ de son mari, la viole. Il l'a menac¨¦e, si elle parlait, de dire qu'elle l'avait s¨¦duit en se d¨¦shabillant devant lui et d'¨ºtre alors chass¨¦e de la maison. Mais, un destin encore plus catastrophique l'attendait : un jour, sa belle-s?ur a trouv¨¦ son mari en sa compagnie, et elle a ¨¦t¨¦ jet¨¦e ¨¤ la rue.

Cette histoire affreuse est celle d'une enfant veuve d'une famille pauvre. Mais, m¨ºme dans les familles ais¨¦es, les veuves plus ?g¨¦es sont souvent forc¨¦es de mener une vie mis¨¦rable.

Cet abandon est le point culminant de la vie d'une veuve, qui a ¨¦t¨¦ construite autour de son mari. Rejet¨¦e par la famille, par la soci¨¦t¨¦, et du monde dans lequel elle vivait et qu'elle connaissait, elle est abandonn¨¦e ¨¤ son sort. Elle est mise ¨¤ l'¨¦cart de sa famille et au ban de la soci¨¦t¨¦. Elle est priv¨¦e de tout ce qu'elle avait lorsqu'elle ¨¦tait mari¨¦e. La mort de son mari a assombri sa vie. Elle n'a ni soutien ¨¦motionnel, ni espoir, ni avenir. Vivant dans l'isolement et dans l'ombre, elle partage le sort de millions de femmes dans le monde - 245 millions en 2010, selon le Rapport de recherche sur les veuves parrain¨¦ par la Fondation Loomba.

Les organismes internationaux, les organisations de femmes et les gouvernements ont contribu¨¦ ¨¤ l'¨¦laboration de projets de lois contre la discrimination et pris des mesures pour r¨¦duire la pauvret¨¦, mais presque toutes ces mesures concernent les femmes en g¨¦n¨¦ral. Pourtant, dans les pays en d¨¦veloppement, une veuve est rarement trait¨¦e comme une autre femme. Les mesures visant ¨¤ aider les femmes leur b¨¦n¨¦ficient rarement et n'ont fait que perp¨¦tuer les abus dont elles sont victimes. Elles perdent non seulement leur mari, mais aussi leur protecteur. Chass¨¦es et bannies, elles sont rejet¨¦es par leur famille et par leur communaut¨¦. En cons¨¦quence, les programmes de r¨¦duction de la pauvret¨¦ ou de lutte contre la discrimination mis en ?uvre par les organisations internationales ou les organisations de femmes leur profitent rarement.

La situation dans laquelle ma m¨¨re s'est trouv¨¦e apr¨¨s la mort pr¨¦coce de mon p¨¨re m'ont d¨¦cid¨¦ de m'occuper de l'¨¦ducation des enfants des veuves pauvres. Cela donnerait non seulement de l'espoir aux veuves, mais assurerait aussi ¨¤ leurs enfants les qualifications et les opportunit¨¦s n¨¦cessaires pour envisager un avenir autre que celui de la pauvret¨¦.

JOURN?E INTERNATIONALE DES VEUVES

La Journ¨¦e internationale des veuves a ¨¦t¨¦ lanc¨¦e par la Fondation Loomba en 2005 ¨¤ la Chambre des Lords ¨¤ Londres et, au cours de cinq ann¨¦es suivantes, nous avons men¨¦ des campagnes pour que cette journ¨¦e soit reconnue ¨¤ l'¨¦chelon international dans le cadre d'une action soutenue, efficace et globale afin de transformer de mani¨¨re radicale et durable la situation des veuves.

En 2006, nous avons tenu une conf¨¦rence internationale sur cette question au Bureau des affaires ¨¦trang¨¨res ¨¤ Londres o¨´ des veuves de dix pays ont pris la parole, ainsi que Cherie Blair, Hillary Clinton, la Ministre indienne Renuka Chowdhury, Yoko Ono et le Secr¨¦taire g¨¦n¨¦ral du Commonwealth Don McKinnon. La Fondation a ouvert des bureaux aux ?tats-Unis et au Canada et organis¨¦ des r¨¦unions aux Nations Unies, mobilisant l'attention et l'appui de dirigeants comme le Pr¨¦sident rwandais Paul Kagame et l'ancien Secr¨¦taire g¨¦n¨¦ral des Nations Unies Kofi Annan.

Le Pr¨¦sident gabonais Ali Bongo Ondimba et son ¨¦pouse, Sylvia Bongo Ondimba, ont personnellement apport¨¦ leur soutien ¨¤ la campagne et, finalement, en d¨¦cembre 2010, l'Assembl¨¦e g¨¦n¨¦rale des Nations Unies a adopt¨¦ la r¨¦solution du Gabon qui reconnaissait officiellement le 23 juin comme Journ¨¦e internationale des veuves.

C¨¦l¨¦brant pour la premi¨¨re fois la Journ¨¦e internationale des veuves le 23 juin 2011, des veuves, des activistes de la soci¨¦t¨¦ civile et des organisations non gouvernementales (ONG), des diplomates, des responsables de l'ONU ainsi que d'autres dignitaires ont assist¨¦ ¨¤ une conf¨¦rence ¨¤ l'ONU ¨¤ New York pour attirer l'attention sur le sort des veuves et de leurs quelque 500 millions d'enfants dans le monde. Bon nombre de veuves vivent dans des conditions de pauvret¨¦ et de d¨¦gradation extr¨ºmes et sont victimes de nombreuses formes de violence. Am¨¦liorer le sort de ces femmes est au centre des Objectifs du Mill¨¦naire pour le d¨¦veloppement et de la justice sociale et ¨¦conomique pour les femmes. Les d¨¦bats de la conf¨¦rence ont ¨¦t¨¦ anim¨¦s par Gillian Tette, r¨¦dactrice du Financial Times. Parmi les participants figuraient Michelle Bachelet, Directrice ex¨¦cutive de ONU Femmes; la Premi¨¨re Dame Sylvia Bongo Ondimba, Cherie Blair, le Pr¨¦sident de la Fondation Loomba; Ban Soon-taek, l'¨¦pouse du Secr¨¦taire g¨¦n¨¦ral des Nations Unies Ban Ki-moon; et Amir Dossal, fondateur du Forum mondial des partenariats.

? la veille de la premi¨¨re Journ¨¦e internationale des veuves, l'artiste Yoko Ono a inaugur¨¦ aux Nations Unies une ?uvre en l'honneur des veuves du monde entier. En outre, une collection de peintures ¨¤ l'huile et ¨¤ l'acrylique mettant en ¨¦vidence le sort des veuves a ¨¦t¨¦ expos¨¦es par l'artiste Reeta Sarkar ¨¦tablie ¨¤ Londres, qui l'a d¨¦di¨¦e ¨¤ sa grand-m¨¨re, Shrimati Pushpa Wati Loomba qui inspir¨¦ la Fondation Loomba.
La d¨¦signation d'une journ¨¦e internationale pour la reconnaissance des droits des veuves par les Nations Unies r¨¦sulte de la v¨¦rification ind¨¦pendante des niveaux de violence et de privation auxquelles sont confront¨¦es des centaines de millions de veuves dans le monde. Depuis sa cr¨¦ation en 1997, la Fondation Loomba s'emploie ¨¤ d¨¦fendre les droits des veuves dans le monde. Au cours des douze derniers mois, elle a continu¨¦ ses programmes d'¨¦ducation et d'autonomisation en Inde ainsi que dans d'autres pays d'Asie du Sud et d'Afrique. Elle a ¨¦galement organis¨¦ des ¨¦v¨¨nements dans de nombreux pays pour sensibiliser au sort des veuves et aux fonds dont elle a besoin pour les aider.

En 2012, lors de la Journ¨¦e internationale des femmes, la Fondation Loomba lancera un nouveau projet pour autonomiser 10 000 femmes pauvres en Inde en faisant don d'une machine ¨¤ coudre ¨¤ chacune d'elles. Elles suivront ¨¦galement un cours de formation de deux semaines pour apprendre ¨¤ confectionner des v¨ºtements. Pour lever des fonds pour ce projet, la Fondation organisera une Marche des c¨¦l¨¦brit¨¦s au pont de Londres avec des femmes c¨¦l¨¨bres du monde entier. La marche sera suivie d'un banquet ¨¤ Whitehall, ¨¤ Londres, avec la pr¨¦sence du Premier Ministre adjoint du Royaume-Uni, Nick Clegg, et de la Ministre en chef de Delhi, Shrimati Sheila Dikshit. Le succ¨¨s de cet effort montrera les progr¨¨s r¨¦alis¨¦s pour am¨¦liorer le statut des veuves - de femmes frapp¨¦es d'ostracisme et d'isolement ¨¤ celles inspirant la piti¨¦ et la compassion, elles sont devenues aujourd'hui des femmes qui participent pleinement au d¨¦veloppement durable. La machine ¨¤ coudre est un symbole et une affirmation de cette identit¨¦; elle permet, ¨¤ partir de mati¨¨res premi¨¨res d'origine locale, de confectionner des v¨ºtements esth¨¦tiques, ¨¤ un prix abordable et adapt¨¦s aux saisons et au climat de la r¨¦gion. Cette transformation a vu le jour gr?ce aux comp¨¦tences, aux efforts et ¨¤ l'ing¨¦niosit¨¦ humaine de femmes fi¨¨res et r¨¦solues qui ont perdu leur mari, mais qui ont une vie et peuvent encore l'enrichir.

Le v¨ºtement que chaque veuve confectionnera est aussi une m¨¦taphore. Car, comme le Secr¨¦taire g¨¦n¨¦ral nous l'a rappel¨¦ l'ann¨¦e derni¨¨re, ? malgr¨¦ les nombreuses difficult¨¦s qu'elles doivent affronter, de nombreuses veuves apportent de pr¨¦cieuses contributions ¨¤ leur pays et ¨¤ leur communaut¨¦ [..]. Elles accueillent des orphelins, deviennent dispensatrices de soins et interviennent aupr¨¨s des bellig¨¦rants afin de r¨¦parer le tissu social ?. Dans nos efforts visant ¨¤ d¨¦velopper et ¨¤ soutenir ce pr¨¦cieux tissu, nous avons la chance d'avoir ¨¤ nos c?t¨¦s le potentiel d'une ressource vaste et in¨¦puisable.

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