2022-UNAT-1240, Ayesha Al Rifai
L'UNAT a noté que la simple question soulevée dans cet appel était de savoir s'il était approprié et correct que le juge ait procédé à la demande de révision des décisions contestées alors que la requête en récusation était en instance. L'UNAT a estimé que la réponse simple est que ce n'était pas le cas. Une demande de récusation peut être introduite à tout moment de la procédure et constitue généralement un choix stratégique difficile pour la partie qui conteste. Une telle demande est généralement présentée au moment où la partie perd confiance dans le juge. Son timing dépendra des circonstances. La catégorisation de la requête de Mme Al Rifai comme « tardive » (en déposant à la veille de l'audience) est donc peu convaincante et sans conséquence. Le choix tactique au cours du litige lui appartenait. Une fois contestée la partialité du juge, son autorité devient ambiguë. La légalité du juge poursuivant le procès ou l'application du fond du litige est remise en question par la requête en récusation. Il va donc de soi que l’ambiguïté juridique et morale de l’autorité du juge doit alors être immédiatement et sommairement déterminée avant que l’affaire puisse aller de l’avant. Le choix de Mme Al Rifai de se retirer et de ne pas participer jusqu’à ce que la question préliminaire soit tranchée constituait une réponse raisonnable et légitime dans les circonstances, quel que soit le bien-fondé de la demande de récusation ou, d’ailleurs, de la demande de révision des décisions contestées. L’affirmation selon laquelle Mme Al Rifai a déposé la demande de récusation dans le but tactique de retarder la procédure jusqu’à l’expiration du mandat du juge est spéculative et n’est étayée par aucune preuve convaincante. La Commission de justice interne a rendu sa décision sur la requête en récusation deux semaines avant l'expiration du mandat du juge, suggérant qu'un report de l'audience était pratiquement réalisable. Mais, en tout état de cause, les exigences du calendrier du juge ne peuvent l’emporter sur le droit procédural fondamental d’une partie de voir sa contestation de la légalité de la procédure examinée avant que le bien-fondé de sa demande soit déterminé. En dernière analyse, l'UNAT a estimé que la DT de l'UNRWA avait commis une erreur de procédure, comme le prévoit l'article 2(1)(d) du Statut de l'UNAT. L'erreur a eu des conséquences dans la mesure où elle a refusé à Mme Al Rifai la possibilité de présenter pleinement son cas au DT de l'UNRWA et de contre-interroger des témoignages défavorables. Il n'y a pas eu de procès complet et équitable sur ces questions, et l'erreur de procédure était donc de nature à affecter la décision de l'affaire. L'UNAT a estimé que le jugement de l'UNRWA DT devait être annulé et que le remède approprié était de renvoyer l'affaire pour qu'elle soit tranchée par un autre juge.
Une allégation de partialité judiciaire est une affaire sérieuse. L'impartialité des décideurs judiciaires et quasi judiciaires constitue un principe fondamental de l'État de droit. La règle contre la partialité repose sur le point de vue logique selon lequel la bonne administration de la justice dépend de la confiance dans le processus administratif et judiciaire. Cela exige que justice soit non seulement rendue, mais qu’elle soit perçue comme telle. Il n’est donc pas nécessaire de prouver un biais réel ; aux fins de la récusation, il suffit qu'il y ait une crainte raisonnable de partialité.
L'appel est accueilli, le jugement n° UNRWA/DT/2021/015 est infirmé et l'affaire est renvoyée au DT de l'UNRWA pour décision de novo et ab initio par un autre juge.