Baisse de la mortalité due au sida
Get monthly
e-newsletter
Baisse de la mortalité due au sida
Pour la première fois depuis l’identification de la pandémie du sida voici un quart de siècle, “nous assistons à un déclin dans le nombre mondial de morts du sida”, a déclaré le Dr Kevin De Cock, Directeur du département VIH/sida à l’Organisation mondiale de la santé (OMS). Les chiffres révisés de l’OMS et du Programme commun des Nations Unies sur le VIH/sida (ONUSIDA) indiquent par ailleurs que les nouvelles infections par le VIH, le virus responsable de la maladie, ont également commencé à diminuer.
Dans Le point sur l’épidémie de sida 2007 publié en novembre, ONUSIDA et l’OMS font état de méthodes de collecte de données plus précises et estiment à environ 33,2 millions le nombre de personnes vivant avec le VIH dans le monde, en recul par rapport à leur estimation de 39,5 millions de l’année précédente. Le rapport s’empresse cependant d’ajouter que cette baisse ne reflète pas un déclin effectif du nombre de personnes vivant avec le VIH, mais qu’il s’agit plutôt d’une révision statistique d’estimations antérieures.
La situation a suscité une vive polémique, certains experts indépendants estimant que les données auraient dû être ajustées dans de plus brefs délais.
En ajustant leurs estimations globales rétroactivement pour les années précédentes, les deux organismes de l’ONU ont découvert certaines tendances encourageantes sur la période. Premièrement, les nouvelles infections par le VIH ont probablement atteint un pic à la fin des années 1990, à plus de 3 millions de nouvelles infections par an. Les estimations révisées indiquent depuis lors un recul progressif, avec environ 2,5 millions de nouvelles infections en 2007.
Ces tendances reflètent dans une certaine mesure les premiers succès appréciables des efforts de prévention du sida. A en juger par les résultats des enquêtes nationales, les jeunes de plusieurs pays évitent davantage les comportements sexuels à risque, que ce soit par l’usage du préservatif ou par la réduction de leur nombre de partenaires ou l’abstinence. Le rapport signale ce type d’évolution des comportements au Botswana, au Cameroun, au Kenya, au Malawi, au Togo, en Zambie, au Zimbabwe et dans quelques autres pays.
Le cauchemar de l’Afrique
Ni la tendance générale de l’évolution de la maladie, ni la révision des estimations ne change pourtant rien à cette flagrante réalité: l’Afrique subsaharienne demeure l’épicentre de la pandémie. De toutes les personnes atteintes par le VIH, environ 22,5 millions, soit 68 % du total mondial, vivent en Afrique subsaharienne. La région représente le même pourcentage en termes de nouvelles infections, ainsi que 76 % des décès annuels dus au sida.
“AIDS continues to be the single largest cause of mortality in sub-Saharan Africa,” says the report. Moreover, in contrast to other world regions, women and children are far more vulnerable to the disease in sub-Saharan Africa. Of those Africans living with HIV, 61 per cent are women, while fully 90 per cent of all HIV-positive children in the world are in sub-Saharan Africa.
Within the continent, Southern Africa is by far the most afflicted, accounting for around a third of all new HIV infections globally and about a third of people living with HIV. In eight countries — Botswana, Lesotho, Mozambique, Namibia, South Africa, Swaziland, Zambia and Zimbabwe — national adult HIV-prevalence rates exceed 15 per cent. South Africa leads the world in the number of people infected with HIV.
Southern African countries, says Daniel Halperin, an AIDS expert at the US’s Harvard School of Public Health, are continuing to experience “real nightmares.” Whatever else the revision in the overall AIDS figures may show, he adds, “this doesn’t mean the epidemic is going away.”
Raffinements statistiques
Dans les pays pauvres, largement ruraux, qui ne disposent que de faibles systèmes de santé et de capacités limitées de collecte de données, il est toujours difficile de mesurer la portée d’une maladie infectieuse, fait remarquer le Dr Paul De Lay (ONUSIDA). “La difficulté est tout aussi grande pour la tuberculose, la polio et la diarrhée infantile."
Dans le cas du VIH/sida, les premières estimations reposaient principalement sur l’information recueillie auprès des jeunes femmes qui se rendaient dans les centres de dépistage parce qu’elles étaient enceintes ou qu’elles craignaient avoir été infectées. Extrapolés au reste de la population, les résultats avaient ensuite servi à estimer les taux d’infection nationaux. Avec le temps, les experts se sont rendus compte que les données des cliniques urbaines étaient biaisées en ce qu’elles accordaient trop de poids statistique aux professionnelles du sexe, aux consommateurs de drogues et aux personnes qui avaient des partenaires sexuels multiples, par rapport aux autres segments de la population.
Avec l’accroissement graduel des sommes consenties par les pays bailleurs de fonds à la lutte contre le sida, une partie des ressources a pu être affectée à la réalisation d’enquêtes nationales de conception plus scientifique, au coût de 2 à 3 millions de dollars par pays. Ces enquêtes ont révélé à tous les niveaux une échelle légèrement réduite de l’épidémie.
D’après ONUSIDA, les analyses des résultats d’enquête en Inde, qui datent de juillet, ont réduit les estimations du nombre de personnes y vivant avec le VIH de plus de 50 %, de 5,7 millions à 2,5 millions. Cette révision représente, à elle seule, la moitié de la baisse enregistrée au niveau de l’estimation mondiale. Pour le reste, ONUSIDA signale notamment les estimations révisées pour cinq pays d’Afrique (Angola, Kenya, Mozambique, Nigéria et Zimbabwe).
Certains chercheurs indépendants disaient depuis plusieurs années déjà que les estimations antérieures de l’ONU étaient excessives, déplorant que leurs arguments soient ignorés. D’aucuns ont même dénoncé une exagération délibérée dans le cadre d’une stratégie internationale alarmiste dont le but aurait été d’obtenir des contributions plus importantes des bailleurs de fonds. Le Dr De Lay qualifie ces accusations d’“absurdes” il serait “techniquement impossible [pour ONUSIDA] de fausser les chiffres”, déclare-t-il. Les données sont en effet recueillies par les ministères nationaux de la santé, pour être ensuite analysées par nombre d’experts internes aussi bien qu’extérieurs au système de l’ONU.
De nombreux pays n’ont pas encore mené d’enquêtes nationales. Pour ceux qui l’ont déjà fait, il serait peu pratique et trop onéreux d’en actualiser chaque année les données. Si les enquêtes produisent aujourd’hui de meilleures données, les calculs d’ONUSIDA et de l’OMS n’en restent pas moins des estimations. Témoin de cette incertitude, Le point sur l’épidémie inclut, pour la plupart des chiffres de référence, une fourchette de limites inférieures et supérieures. Ainsi, le nombre total de personnes vivant avec le VIH dans le monde est estimé à 33,2 millions, dans une fourchette comprise entre 30,6 millions et 36,1 millions.
La vigilance s’impose
Que les chiffres augmentent ou qu’ils diminuent, les experts mettent en garde contre tout relâchement de la vigilance. Comme le souligne le Dr De Lay, le sida est toujours incurable. Qui plus est, dans certains pays qui avaient pourtant enregistré une baisse des taux d’infection mais qui ont réduit leurs programmes de lutte, “on assiste aujourd’hui à une recrudescence de l’épidémie”. Le rapport fait état de taux de prévalence repartis à la hausse aux Etats-Unis, au Royaume-Uni et en Allemagne, de même qu’en Ouganda, naguère salué pour le succès de son combat contre le VIH.
Il ne faudrait pas non plus que la communauté internationale laisse fléchir ses efforts. Les contributions internationales actuelles, chiffrées à quelque 10 milliards de dollars par an, restent insuffisantes face à l’ampleur des besoins. “L’épidémie est encore gigantesque, et les ressources nécessaires pour y faire face le sont aussi”, affirme Paul Zeitz, Directeur général de l’ONG internationale Global AIDS Alliance de Washington.
ONUSIDA et l’OMS entendent publier en 2008 un rapport consacré au financement de la lutte mondiale contre le sida. D’après le Dr De Lay, il n’est pas impossible que les coûts de traitement projetés, notamment pour l’apport d’antirétroviraux aux sidéens, représentent en 2010 environ 5 % de moins qu’on ne le pensait jusque-là. Le total nécessaire n’en restera pas moins d’environ 38 milliards de dollars, soit bien plus que les ressources actuellement allouées à cette action.
“Il nous faut reconnaître la nature à très long terme de la pandémie du VIH, déclare le Dr De Cock. Nous en avons encore pour des décennies. Une partie [de la population actuellement infectée] doit être traitée dès maintenant; tous devront l’être à terme. Les implications qualitatives n’ont guère changé.”