缅北禁地

Un agriculteur du Burkina Faso, l鈥檜n des nombreux pays africains souffrant de l鈥檃ggravation de p茅nuries d鈥檈au et d鈥檃utres effets du changement climatique.

Photo: Redux/LAIF / Werner Gartung

Ce n鈥櫭﹖ait pas l鈥檃ccord qui avait 茅t茅 souhait茅. Mais dans la nuit du 18 au 19 d茅cembre, alors que pr猫s de deux semaines de n茅gociations houleuses risquaient de se solder par un 茅chec, un accord de port茅e restreinte a finalement 茅t茅 conclu par une trentaine de dirigeants, sur les 120 gouvernements ou presque repr茅sent茅s 脿 la conf茅rence des Nations Unies sur le changement climatique.

Lorsque le texte a 茅t茅 pr茅sent茅 au reste des pr茅sidents, ministres et autres repr茅sentants, plusieurs pays en d茅veloppement ont rejet茅 l鈥檃ccord de Copenhague, t茅moignant ainsi du chaos et de l鈥檃gitation qui avaient marqu茅 les n茅gociations. Cette opposition a emp锚ch茅 de parvenir au consensus n茅cessaire pour adopter officiellement le texte final ; la conf茅rence a donc 脿 la place 鈥減ris note鈥� de l鈥橝ccord. Mais les principaux pays industrialis茅s, ainsi que la Chine, l鈥橝frique, les pays les moins avanc茅s et de nombreux autres pays se sont d茅clar茅s favorables 脿 ce texte, 脿 contrec艙ur pour certains et avec des r茅serves pour beaucoup.

鈥淣ous souhaitions un accord complet, juridiquement contraignant鈥�, a d茅clar茅 le Pr茅sident de l鈥橝frique du Sud, Jacob Zuma, exprimant l鈥檕pinion partag茅e par les repr茅sentants de nombreux pays, 鈥渕ais nous acceptons les progr猫s accomplis鈥�. Le Secr茅taire g茅n茅ral de l鈥橭NU, Ban Ki-moon, a reconnu que 鈥渓鈥檃ccord de Copenhague ne r茅pond peut-锚tre pas 脿 toutes les attentes鈥�. Cependant, a-t-il soulign茅, 鈥渃鈥檈st un d茅but 鈥� un d茅but essentiel鈥�.

Pour l鈥橝frique en particulier, l鈥檃ccord est significatif 脿 deux 茅gards : par sa teneur m锚me, ainsi que du fait de la pr茅sence importante de l鈥橝frique au cours des n茅gociations. L鈥橝frique est souvent rel茅gu茅e en marge de tels pourparlers internationaux et g茅n茅ralement exclue des tractations qui ont lieu en coulisse. Mais 脿 Copenhague, plusieurs dirigeants africains, notamment le Pr茅sident Zuma et le Premier Ministre 茅thiopien Meles Zenawi, ont activement contribu茅 脿 l鈥櫭﹍aboration du texte final.

R茅duire les 茅missions de gaz 脿 effet de serre

Bien avant la conf茅rence de Copenhague, de nombreux gouvernements et d茅fenseurs de l鈥檈nvironnement s鈥櫭﹖aient fix茅 comme objectif d鈥檃dopter un nouvel accord international qui succ茅derait au Protocole de Kyoto de 1997, lequel arrivera 脿 expiration en 2012. Ce protocole fait obligation aux pays industrialis茅s qui y ont adh茅r茅 de r茅duire consid茅rablement leurs 茅missions de gaz polluants 鈥溍� effet de serre.鈥� Les Etats-Unis n鈥檃yant pas sign茅 le Protocole de Kyoto et la Chine et d鈥檃utres 鈥渕arch茅s 茅mergents鈥漲ui produisent 茅galement de grandes quantit茅s de gaz 脿 effet de serre n鈥櫭﹖ant pas oblig茅s de r茅duire leurs 茅missions, beaucoup esp茅raient qu鈥檜n nouvel accord juridiquement contraignant s鈥檃ppliquerait 脿 ces diff茅rents pays.

Mais 脿 mesure que la conf茅rence approchait, il est apparu de plus en plus clairement qu鈥檜n tel accord ne b茅n茅ficiait pas d鈥檜n appui suffisant. L鈥檃ccord de Copenhague t茅moigne en revanche d鈥檜ne 鈥渇orte volont茅 politique鈥� de combattre le changement climatique, au moyen de 鈥渞茅ductions importantes des 茅missions 脿 l鈥櫭ヽhelle mondiale鈥� qui limiteraient 脿 2 degr茅s Celsius la hausse de la temp茅rature mondiale moyenne, par rapport au niveau de l鈥櫭﹑oque pr茅industrielle (cette hausse est maintenant d鈥檈nviron un degr茅).

Le Pr茅sident sud-africain Jacob Zuma (脿 gauche), assis aux c么t茅s du Pr茅sident br茅silien Luis In谩cio Lula da Silva et du Pr茅sident am茅ricain Barack Obama, lors d鈥檜ne s茅ance de n茅gociation de la conf茅rence de Copenhague sur le changement climatique. L鈥橝frique a jou茅 un r么le important au cours de ces n茅gociations.

Photo: Associated press / Susan Walsh

En plus de souligner l鈥檃bsence d鈥檕bjectifs chiffr茅s pr茅cis et obligatoires, un certain nombre de d茅tracteurs de l鈥檃ccord ont 茅galement contest茅 la limite de 2 degr茅s Celsius. Le Soudanais Lumumba Di-Aping, coordonnateur du Groupe des 77 (pays en d茅veloppement), a estim茅 qu鈥檃utoriser une telle hausse de la temp茅rature s鈥檃pparentait 脿 un 鈥減acte suicidaire鈥�. La plupart des repr茅sentants africains ne partageaient pas cette opinion.

Les repr茅sentants des petits 脡tats insulaires en d茅veloppement ont quant 脿 eux demand茅 une limite de 1,5 degr茅, estimant que toute hausse sup茅rieure de la temp茅rature entra卯nerait une mont茅e inqui茅tante du niveau de la mer et menacerait leur survie m锚me. L鈥檃ccord de Copenhague reconna卯t qu鈥檜ne limite de 2 degr茅s pourrait ne pas 锚tre suffisante et pr茅conise de r茅茅valuer cet objectif d鈥檌ci 脿 2015.

Ind茅pendamment des lacunes de l鈥檃ccord, bon nombre de pays ont consid茅r茅 que la participation des 脡tats-Unis, de la Chine et d鈥檃utres pays 脿 l鈥檃ccord de Copenhague constituait un pas en avant. La Ministre de l鈥檈au et de l鈥檈nvironnement de l鈥橝frique du Sud, Buyelwa Sonjica, a qualifi茅 de 鈥減rogr猫s d茅cisif鈥� la participation des 脡tats-Unis aux n茅gociations. La Ministre de l鈥檈nvironnement de la Tanzanie, Batilda Burian, a d茅clar茅 que l鈥檈ngagement pris par les 脡tats-Unis de r茅duire leurs 茅missions de 17 % par rapport au niveau de 2005 茅tait l鈥檜n des 鈥済rands succ猫s鈥� du sommet.

Promesses de fonds

L鈥橝frique et les pays en d茅veloppement d鈥檃utres r茅gions estiment depuis longtemps que, les grandes nations industrialis茅es ayant le plus contribu茅 au r茅chauffement plan茅taire, elles devraient en assumer les co没ts. Les pays pauvres comptent b茅n茅ficier d鈥檜ne assistance financi猫re importante, 脿 la fois pour s鈥檃dapter aux effets du changement climatique et pour favoriser un d茅veloppement 茅conomique qui ne nuise pas 脿 l鈥檈nvironnement.

L鈥檃ccord de Copenhague ent茅rine ce principe. Les pays d茅velopp茅s s鈥檈ngagent 脿 fournir aux pays en d茅veloppement des 鈥渞essources nouvelles et suppl茅mentaires鈥� pouvant aller jusqu鈥櫭� 30 milliards de dollars pendant trois ans (de 2010 脿 2012).

L鈥檃ccord a fix茅 pour objectif d鈥檃ccro卯tre le financement accord茅听 jusqu鈥櫭� atteindre environ 100 milliards de dollars par an en 2020,听 脿 condition que les pays en d茅veloppement prennent leurs propres mesures pour r茅duire les 茅missions de gaz 脿 effet de serre et veillent 脿 une utilisation transparente des fonds ext茅rieurs.

Certains repr茅sentants de pays en d茅veloppement souhaitaient un financement beaucoup plus 茅lev茅. L鈥橴nion africaine avait estim茅 qu鈥檌l faudrait 67 milliards de dollars par an d鈥檌ci 脿 2020 脿听 l鈥檈nsemble des pays en d茅veloppement pour s鈥檃dapter aux effets du changement climatique, en plus de 200 milliards par an pour r茅duire les 茅missions, passer 脿 des sources d鈥櫭﹏ergie plus propres et pr茅server leurs for锚ts.

Mais lors de la conf茅rence, le Premier Ministre 茅thiopien Meles, qui repr茅sentait l鈥橴nion africaine, n鈥檃 cit茅 que les chiffres les plus bas, qui ont finalement 茅t茅 retenus dans l鈥檃ccord. Il a reconnu que sa proposition allait d茅cevoir certains Africains mais a estim茅 qu鈥檌l valait mieux restreindre les attentes de l鈥橝frique, 鈥渆n 茅change d鈥檜n financement plus fiable et d鈥檜ne participation 脿 la gestion de ces fonds鈥� (voir article).

Mais pour de nombreux pays, la fiabilit茅 de ces fonds n鈥檃 rien de certain. Le Pr茅sident du Burkina Faso, Blaise Compaor茅, souhaitait obtenir l鈥檃ssurance que ces fonds ne seraient pas pr茅lev茅s sur les budgets actuels de l鈥檃ide au d茅veloppement, tandis que d鈥檃utres participants ont rappel茅 les nombreuses promesses non tenues des donateurs.

Une ferme intervention africaine

Bien avant la conf茅rence, l鈥橴nion africaine a d茅cid茅 que le continent devrait y participer de fa莽on plus unie et coh茅rente qu鈥檌l ne le fait g茅n茅ralement lors des r茅unions internationales de ce type et a nomm茅 脿 cette fin le Premier Ministre Meles n茅gociateur en chef. Les experts techniques et sp茅cialistes des politiques africains se sont donc r茅unis chaque matin pour coordonner leurs travaux au sein des diverses r茅unions de comit茅s et s茅ances de r茅daction de la conf茅rence. Les pays africains ont 茅galement jou茅 un r么le de premier plan dans le cadre d鈥檃utres groupements, le Soudan pr茅sidant le Groupe des 77 et le Lesotho 茅tant 脿 la t锚te des pays les moins avanc茅s. 听

Le 14 d茅cembre, alors que certains pays semblaient envisager d鈥檃bandonner le Protocole de Kyoto, les repr茅sentants de pays africains ont momentan茅ment paralys茅 la conf茅rence en quittant les lieux. Les n茅gociations ont rapidement repris et le Protocole de Kyoto est rest茅 intact.

L鈥橝frique du Sud, l鈥櫭ヽonomie la plus industrialis茅e de l鈥橝frique et une source non n茅gligeable d鈥櫭﹎issions de gaz 脿 effet de serre, a jou茅 un r么le d茅cisif. Reconnaissant cette responsabilit茅, le Pr茅sident Zuma s鈥檈st engag茅 脿 ce que son pays r茅duise ses 茅missions de 34 % d鈥檌ci 脿 2020 et de 42 % d鈥檌ci 脿 2025, avec un appui financier et technique de la communaut茅 internationale.

Lorsque les n茅gociations semblaient vou茅es 脿 l鈥檌mpasse, le Pr茅sident Zuma a envisag茅 avec d鈥檃utres dirigeants africains de quitter les lieux, a par la suite racont茅 aux journalistes la n茅gociatrice sud-africaine Joanne Yawitch. Mais ils ont d茅cid茅 qu鈥檌l valait mieux rester et continuer 脿 influencer l鈥檌ssue de la conf茅rence de l鈥檌nt茅rieur. Le Pr茅sident Zuma et plusieurs autres dirigeants africains, dont M. Meles et les repr茅sentants du Lesotho et de l鈥橝lg茅rie, ont pris part 脿 une s茅rie de r茅unions informelles regroupant une trentaine de pays, au cours desquelles a 茅t茅 n茅goci茅 le texte final de l鈥檃ccord de Copenhague.

Les d茅fenseurs africains de l鈥檈nvironnement consid猫rent que cette d茅termination sera 茅galement vitale lors des prochains cycles de pourparlers sur le climat 鈥� deux semaines de n茅gociations 脿 Bonn (Allemagne) en milieu d鈥檃nn茅e et une autre conf茅rence de haut niveau des Nations Unies 脿 Mexico vers la fin de l鈥檃nn茅e 2010.

La conf茅rence de Copenhague n鈥檃 pas permis d鈥檕btenir un accord 茅quitable et juridiquement contraignant, a d茅clar茅 脿 Dakar le 23 d茅cembre Mamadou Barry, coordonnateur de la Coalition de la jeunesse s茅n茅galaise sur les changements climatiques. Mais il est important que les dirigeants africains y aient particip茅 de fa莽on concert茅e. Lors des futures n茅gociations, a-t-il ajout茅, les dirigeants africains devraient 鈥渕aintenir la coh茅sion afin que la justice climatique soit effective pour le continent鈥�.