Les pays africains ont toujours été plus que désireux d'embrasser un avenir fait d'énergie verte, ce qui reste à déterminer est un chemin clair vers un tel avenir.
Ce mois de novembre, l'Égypte accueillera la 27e Conférence des parties ( CdP27 ) à Sharm El Sheik, où les participants examineront la mise en œuvre des nombreux engagements pris pour atténuer la crise climatique imminente et en ajouteront de nouveaux.
La voix et les messages clés de l'Afrique doivent donc être pragmatiques à Sharm El Sheik, reconnaissant que sans percées technologiques pour améliorer la fiabilité, l'abordabilité et la facilité de distribution, les changements radicaux pour faire pencher la balance énergétique mondiale en faveur de l'énergie verte prendront beaucoup plus de temps que les projections de "net zéro" d'ici 2030 ou même 2050.
Pour réaliser le potentiel de transformation économique et de création d'emplois de l'Afrique, il faut se concentrer sur ce qui doit être renforcé, harmonisé et construit dans le secteur de l'énergie, le tout adapté aux priorités et réalités nationales.
- les investissements dans les infrastructures telles que les réseaux de distribution nationaux et régionaux.Ìý
- l'augmentation de l'efficacité des réseaux de transmission et de distribution.Ìý
- la recherche et le développement de technologies de stockage de l'énergie spécifiques aux contextes africains.Ìý
- l'harmonisation des cadres réglementaires, et
- le renforcement des fournisseurs d'énergie et des services publics.
Autant de raisons pour lesquelles une interdiction générale d'une ou plusieurs sources d'énergie ou un transfert à 100 % des investissements vers les énergies renouvelables basées uniquement sur le solaire et l'éolien est contre-productif.
Pour les pays africains, l'accès à l'énergie n'est plus seulement une question d'équité et de développement économique. Il a des implications réelles et graves pour la paix et la sécurité du continent, avec une demande croissante de nourriture et d'énergie et une population jeune qui réclame un meilleur avenir.Ìý
- Premièrement, les pays africains sont dépeints uniquement comme des exportateurs de leurs ressources, et non comme des consommateurs. Cette mentalité est perpétuée dans certains milieux parce que le financement est le plus souvent "facilement" disponible pour développer une ressource/matière première afin de satisfaire la demande, généralement en dehors du continent.Ìý
- Deuxièmement, de manière tragique, les données disponibles montrent que les combustibles fossiles représentent 84 % de la consommation énergétique mondiale. Même si le monde effectue une transition radicale vers les énergies renouvelables, il est fort probable que la demande de gaz naturel diminuera progressivement. Son utilisation en tant que combustible de transition et combustible de secours plus propre pour contrer l'intermittence de l'énergie solaire et éolienne subsistera pendant les 25 à 30 prochaines années, à moins d'améliorations significatives et pratiques en termes de coûts.Ìý
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Pour parvenir à un approvisionnement fiable en électricité pour tous, il faudrait presque quadrupler ce montant, qui atteindrait environ 120 milliards de dollars par an jusqu'en 2040... La mobilisation des ressources nationales, la réduction des flux financiers illicites, ainsi que la planification et les investissements énergétiques à long terme sont des facteurs essentiels pour l'accès à l'énergie et la croissance de l'Afrique.
Quatrièmement, les Africains ont besoin d'une vision réaliste du financement énergie/climatÌý
Lors de la CdP de 2009, les pays riches ont promis de mobiliser 100 milliards de dollars supplémentaires par an en financement climatique pour les pays en développement.Ìý
Non seulement ce chiffre n'a jamais été atteint, mais peu des milliards également déclarés comme financement climatique sont nouveaux, et la part de l'Afrique a été inférieure à un tiers de ce qui a été mis à disposition. En effet, les attentes de transferts massifs et flexibles de la part des pays riches pour permettre aux pays en développement d'investir dans leur avenir climatique sont, au mieux, trompeuses.Ìý
En réalité, le rythme actuel d'investissement et de mise en Å“uvre de l'accès à l'énergie est très lent. L'Afrique ne représente actuellement que 4 % des investissements mondiaux dans l'approvisionnement en électricité, et même cela est concentré dans une poignée de pays sur le continent.Ìý
Pour parvenir à un approvisionnement fiable en électricité pour tous, il faudrait multiplier par presque quatre les investissements pour atteindre environ 120 milliards de dollars par an jusqu'en 2040. Si les performances passées sont un indicateur, ce chiffre ne va pas augmenter comme par magie.Ìý
De plus, les marchés financiers et les acteurs du secteur privé ne changeront pas soudainement leurs modèles commerciaux pour accorder des financements concessionnels et des objectifs de profit réduits aux projets énergétiques africains, renouvelables ou non.Ìý
Ce ne sont là que quelques-unes des nombreuses raisons pour lesquelles la mobilisation des ressources nationales, la réduction des flux financiers illicites, ainsi que la planification et les investissements énergétiques à long terme sont des facteurs vitaux pour l'accès à l'énergie et la croissance de l'Afrique.
Alors que l'élan monte vers Sharm El Sheik ce mois-ci, la " CdP de l'Afrique " devrait être un forum où le monde entend véritablement les préoccupations des Africains. De même, les pays africains devraient tirer les leçons du "Partenariat pour une transition énergétique juste visant à soutenir la décarbonisation de l'Afrique du Sud", l'une des réalisations les plus marquantes de la CdP 26 de novembre 2021.Ìý
Cette initiative promet de mobiliser un engagement initial de 8,5 milliards de dollars pour la première phase de financement de la transition de l'Afrique du Sud.Ìý
Un an plus tard, sa mise en œuvre pratique est toujours en chantier en raison de la complexité même des négociations quant à l'origine de l'argent, la manière dont le pays le dépensera et les conditionnalités à remplir avant d'accéder au financement.
Mme Cristina Duarte est la conseillère spéciale pour l'Afrique auprès du Secrétaire général des Nations Unies.